🌞 Comme Une Bouteille A La Mer Soprano Parole

Commeune bouteille Ă  la mer. La visage plongĂ© dans les Ă©toiles, noyĂ© dans ma gamberge, J'cherche une Ăźle, une berge, ou au moins un bout d'bois, J'me sens, comme une bouteille Ă  la Encore une prise de bec avec ma mĂšre,J’fais le sourd, claque la porte,pour oublier j’ricane avec mes potes en tapissant un visage plongĂ© dans les Ă©toiles, noyĂ© dans ma gamberge,J’cherche une Ăźle, une berge, ou au moins un bout d’bois,J’me sens, comme une bouteille Ă  la mer,j’vais oĂč l’flot de la vie m’mĂšne,loin de tout, mĂȘme de ma vie m’a offert la solitude de Robinson,J’voudrais repeindre ma vie, mais je n’trouve pas le bon ont fait le grand saut, mariĂ©s, des enfants,nous lachent leurs discours de rĂ©ussite, leur vie est mieux qu’avant,c’est ce qu’ils nous d’la lassitude dans leur regardmais eux au moins ont essayĂ© d’sortir de leur brancard,moi, j’ai l’impression d’avoir ratĂ© des tas de trains,pourtant je n’ai jamais quittĂ© l’quai, la preuve les jeunes mesquattent, ça temps a soufflĂ© sur ma vingt-cinquiĂšme bougie,j’en suis mĂȘme pas sur, j’suis toujours dans le mĂȘme logis,dans la mĂȘme logique;le piano des Feux de l’Amour pour m’rĂ©veiller,la petite soeur pour m’faire Ă  j’l’ai fait pour un m’calmer j’rappe, d’autres roulent, voilĂ  ...Une femme, des fois j’me dis que c’est la pire arnaque d’la vied’un homme,certains disent qu’une d’elle viendra un jour Ă©clairer mon le voir d’cet angle,pour l’instant les couteaux qu’j’ai sur mes omoplates ont des tracesde rouge Ă  bon la vie faut la vivre, donc j’la vis,fuis les vitres brisĂ©es d’mon existance, continue navigue, mĂȘme dansl’videJ’vire Ă  tribord, prends la fuite, Ă  travers mes lignes te dĂ©cris mesridesMe construit un mythe, oblige,J’sens qu’mon pouls ralentitfaut qu’j’laisse une trace d’un mec honnĂȘte ou d’un gros bandit,rien Ă  foutre, faut qu’j’prouve que j’ai Ă©tĂ© vivant,si tu penses que j’dois voir un psy, dis-toi qu’j’n’ai qu’le rapcomme la marrĂ©e est haute, et j’me laisse emporter par les vagues,elles sont trop fortes, j’voudrai t’dire que j’t’aime mais j’aitrop le trac,marque mon front de ton sourire, s’il te plait oublie toutes les foisoĂč j’t’ai fait souffrirJ’sais qu’l’effort est une force que j’maitrise peuet j’sais aussi qu’c’est le parapluie qu’il faut quand sur tesjoues il pleutMais dans ma tĂȘte j’entends des coups de flingue incessants,un braconnier a laissĂ© des plumes de colombe, plein de apprendre Ă  donner, j’ai appris Ă  tout mangerapprendre Ă  pardonner, j’ai appris Ă  me venger,j’voulais apprendre Ă  aimer, j’ai appris Ă  haĂŻrj’ne voulais pas ramer, j’l’ai fait, avec un gros navirej’ai voulu eviter la pluie, j’l’ai affrontĂ© en t-shirtj’la voulais pour la vie, j’ne l’ai eu que pour un flirt,J’me sens, comme une bouteille Ă  la mer, noyĂ© dans les vagues de lamĂ©lancolie d’la vieComme une bouteille Ă  la mer, j’me sens... ad libitumSOSComme une bouteille Ă  la mer, Ă  la recherche d’une ville d’un navirequ’on puisse me repĂȘcher et lire ce qu’il y a dans mon coeur,ce qu’il y a en moiComme une bouteille Ă  la mer, j’me sens...
Pourles amoureux de la vie, de la lecture, du cinéma, de la musique, de la cuisine, du soleil, de la mer, du ciel, de Paris. A soprano in Paris Pour les amoureux de la vie, de la lecture, du cinéma, de la musique, de la cuisine, du soleil, de la mer, du ciel, de Paris. septembre 2007. lun. mar. mer. jeu. ven. sam. dim. 1: 2: 3
[Couplet unique]Encore une prise de bec avec ma mĂšre, j'fais le sourd, claque la portePour oublier j'ricane avec mes potes en tapissant un blocLe visage plongĂ© dans les Ă©toiles, noyĂ© dans ma gambergeJ'cherche une Ăźle, une berge, ou au moins un bout d'boisJ'me sens, comme une bouteille Ă  la merJ'vais oĂč l'flot de la vie m'mĂšne, loin de tout, mĂȘme de ma mĂšreLa vie m'a offert la solitude de RobinsonJ'voudrais repeindre ma vie, mais je n'trouve pas le bon pinceauCertains ont fait le grand saut, mariĂ©s, des enfantsNous lĂąchent leurs discours de rĂ©ussite, leur vie est mieux qu'avantC'est ce qu'ils nous disent, j'vois d'la lassitude dans leur regardMais eux au moins ont essayĂ© d'sortir de leur brancardMoi, j'ai l'impression d'avoir ratĂ© des tas de trainsPourtant je n'ai jamais quittĂ© l'quai, la preuve les jeunes me squattent, ça craintLe temps a soufflĂ© sur ma vingt-cinquiĂšme bougieJ'en suis mĂȘme pas sĂ»r, j'suis toujours dans le mĂȘme logisDans la mĂȘme logique, le piano des Feux de l'Amour pour m'rĂ©veillerLa petite sƓur pour m'faire Ă  graillerBrailler, j'l'ai fait pour un rienPour m'calmer j'rappe, d'autres roulent, voilĂ  nos deux moyens aĂ©riensUne femme, des fois j'me dis que c'est la plus grosse arnaque d'la vie d'un hommeCertains disent qu'une d'elle un jour viendra un jour Ă©clairer mon ombreJ'espĂšre le voir d'cet anglePour l'instant les couteaux qu'j'ai sur mes omoplates ont des traces de rouge Ă  onglesMais bon la vie faut la vivre, donc j'la visFuis les vitres brisĂ©es d'mon existence, continue navigueMĂȘme dans l'vide, j'vire Ă  tribordPrends la fuite, Ă  travers mes lignes te dĂ©cris mes ridesMe construit un mythe, oblige, j'sens qu'mon pouls ralentitFaut qu'j'laisse une trace d'un mec honnĂȘte ou d'un gros banditRien Ă  foutre, faut qu'j'prouve que j'ai Ă©tĂ© vivantSi tu penses que j'dois voir un psy, dis-toi qu'j'n'ai qu'le rap comme divanM'man la marĂ©e est haute, et j'me laisse emporter par les vaguesElles sont trop fortes, j'voudrais t'dire que j't'aime mais j'ai trop le tracMarque mon front de ton sourireS'il te plait oublie toutes les fois oĂč j't'ai fait souffrirJ'sais qu'l'effort est une force que j'maitrise peuEt j'sais aussi qu'c'est le parapluie qu'il faut quand sur tes joues il pleutMais dans ma tĂȘte j'entends des coups de flingue incessantsUn braconnier a laissĂ© des plumes de colombe, plein de sangJ'voulais apprendre Ă  donner, j'ai appris Ă  tout mangerApprendre Ă  pardonner, j'ai appris Ă  me vengerJ'voulais apprendre Ă  aimer, j'ai appris Ă  haĂŻrJ'ne voulais pas ramer, j'l'ai fait, avec un gros navireJ'ai voulu Ă©viter la pluie, j'l'ai affrontĂ© en t-shirtJ'la voulais pour la vie, j'ne l'ai eu que pour un flirtJ'me sens, comme une bouteille Ă  la merNoyĂ© dans les vagues de la mĂ©lancolie d'la vieComme une bouteille Ă  la mer, j'me sens...[Pont ad libitum]Comme une bouteille Ă  la mer, comme une bouteille Ă  la merJ'me sens comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens comme une bouteille Ă  la merJ'me sens comme une bouteille Ă  la mer, comme une bouteille Ă  la merJ'me sens comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens comme une bouteille Ă  la merComme une bouteille Ă  la mer, j'me sens comme une bouteille Ă  la merComme une bouteille Ă  la mer, j'me sens, j'me sens comme une bouteille Ă  la mer[Outro]SOSComme une bouteille Ă  la mer, Ă  la recherche d'une ville d'un navireQu'on puisse me repĂȘcher et lireCe qu'il y a dans mon cƓur, ce qu'il y a en moiComme une bouteille Ă  la mer, comme une bouteille Ă  la mer j'me sens...J'me sens comme une bouteille Ă  la merComme une bouteille Ă  la mer, j'me sensHow to Format LyricsType out all lyrics, even repeating song parts like the chorusLyrics should be broken down into individual linesUse section headers above different song parts like [Verse], [Chorus], italics lyric and bold lyric to distinguish between different vocalists in the same song partIf you don’t understand a lyric, use [?]To learn more, check out our transcription guide or visit our transcribers forumAboutSolo de Soprano sur l'album des Psy 4 “Enfants de la Lune” Soprano y exprime son dĂ©sespoir Ă  travers l'image de la bouteille Ă  la mer un cri de dĂ©tresse, mais aussi le fait de livrer son destin au hasard, de se laisser balloter par le courant. Ask us a question about this song6. Comme une bouteille Ă  la merCreditsRelease DateSeptember 27, 2005Tags
unmec avec de superbe parole. Signaler. VidĂ©os Ă  dĂ©couvrir. VidĂ©os Ă  dĂ©couvrir. À suivre. 4:47. Soprano - Comme une bouteille a la mer. Benoit. 3:36. soprano comme une
Le quotidien me creuse les joues j'essaie d'Ă©vacuer son stressDe ma vie j'enlĂšve des jours, Ă  force de me dĂ©truire sans cesseQuand les soirĂ©es durent plus d'un jour des drogues plus dĂ»res que mes parolesTu veux savoir Ă  quoi on joue ? Et bah demande ça Ă  l'espagnolAujourd'hui j'me suis calmĂ© j'mets juste de l'alcool dans mes verresJ'te jure qu'ils prendraient peur si ils savaient c'que j'ai mis dans mes veinesEn parlant de veine j'sais que j'en ai eu, d'ailleurs si tu veux j'peux dĂ©taillerParce-qu'il y en a qui en ont tellement pas qu'ils ont fini par se les taillerMes rhos s'Ă©garent ils rĂȘvent de go et d'gros cigares mais l'portefeuille ne grossit guĂšreLes portes se ferment trop d'soucis gars mais faut s'y faireSous mes airs j'suis pas si fier, l'ĂȘtre humain, faut pas s'y fierJ'prends les bouteilles pour des gonzesses, Ă  force de les sifflerT'apprĂ©cies frĂšre car c'est si vrai, aprĂšs 6 verres j'suis lessivĂ©J'Ă©cris ces vers pour le CD car ma mixtape c'est mon CVEt j'accĂ©lĂšre car quand c'est rouge pour moi c'est vertJ'Ă©cris des vers quand je vois rougePas de lumiĂšre quand j'broie du noir bah j'bois du rougeAvec l'amour j'crois bien que j'ai coupĂ© les pontsDans la vie j'dois faire des choix et j'suis pas trĂšs sĂ»r de faire les bonsOn a tous le cƓur qui saigne, on veut que ça s'arrĂȘte c'est Ă©videntMais la douleur c'est notre moteur car elle nous montre qu'on est vivantEt si l'amour est un film bah j'dois t'avouer que j'ai pas l'scĂ©nar'La vie est une longue course j'veux pas finir comme Ayrton SennaDonc console-moi ou conseille-moi, peut-ĂȘtre qu'on s'aime mais on s'Ă©loigneDemain c'est loin, dans mon cƓur c'est l'waĂŻ et dans l'alcool c'est noyĂ©Donc j'bois la tasse, peur d'avancer donc j'fais la plancheEt autour de moi y'a qu'des raskass, des requins pas des plongeursLe poids de mes pĂȘchers va tĂŽt ou tard me coĂ»ter cherCar dans mon ocĂ©an y'a que des cadavres Ă  repĂȘcherEt puis j'ai beau chercher j'vois pas de terre Ă  l'horizonT'imagines pas comme j'peux chialer devant l'innocence d'un nourrissonParce que des gamins mangent des pierres pendant que d'autres graillent du caviarParce que sur Terre on s'sent bien seul, alors qu'on est des milliardsHow to Format LyricsType out all lyrics, even repeating song parts like the chorusLyrics should be broken down into individual linesUse section headers above different song parts like [Verse], [Chorus], italics lyric and bold lyric to distinguish between different vocalists in the same song partIf you don’t understand a lyric, use [?]To learn more, check out our transcription guide or visit our transcribers forum
Cest bien mieux comme ca Tourbillon Soprano A la bien Comme une bouteille Ă  la mer Ferme Les Yeux Halla Halla Inaya MĂ©lancolique anonyme Parle moi Puis Qu’il Faut Vivre Stanislas La Belle de Mai Star Academy Adieu Monsieur le professeur Stephan Eicher 1000 vies Stress Dur Dur d'etre Billy On n'a qu'une terre Rail de musique Te quiero
A la fin de Conversation en Sicile, la simple prĂ©sence d’une voix-off souhaite au roman d’ĂȘtre retrouvĂ© dans une bouteille Ă  la mer et indique Ă  la maniĂšre d’Adorno, le modĂšle de la seule communication » utile pour nous aujourd’hui Ă  contretemps des idĂ©aux intersubjectifs et de leurs pratiques qui constituent le consensus des marchĂ©s et des mĂ©dias. Livre mĂ©tĂ©orite, psychisme noir, a-t-on dit Ă  raison, comme tous ces actes de crĂ©ation qui surgissent, singuliers, dans les techniques les plus disparates, Ă  mĂȘme la matiĂšre du rĂ©el, en y composant juste une idĂ©e pour la vivre autrement. Si leur rĂ©ception change aussi, c’est qu’elle est engendrĂ©e prĂ©cisĂ©ment par cette exigence pragmatique de non style qui dĂ©borde le matĂ©riel artistique et la reconnaissance d’un auteur, pour nous les faire cĂŽtoyer, ni de trop prĂšs empathie mimĂ©tique, ni de trop loin rĂ©flexion intellectuelle, c’est-Ă -dire par sympathie constructiviste. Nostalgies d’enfance Alors on s’embarque avec le hĂ©ros du roman, Silvestro Ferrauto, typographe linotypiste[[Conversation en Sicile Gallimard,1948, L’imaginaire 1990 a Ă©tĂ© traduit, comme d’ailleurs tous les autres romans d’Elio Vittorini, par Michel Arnaud. Il nous semble que ces traductions, privilĂ©giant l’intelligibilitĂ© et la clartĂ© du sens des textes, dans une sorte de souci de dĂ©termination historique » Vittorini nĂ©o-rĂ©aliste, justement en sacrifient trop leur charge tensorielle, par rĂ©duction et subordination de la ligne syntaxique Ă  la staticitĂ© des rapports signifiant/signifiĂ©. Les mĂȘmes qui, si souvent, sont bousculĂ©s dans la version originale, vĂ©ritablement rĂ©inventĂ©s, comme effets en mouvement de la production d’une simple ligne ».l raconte un hiver rĂ©volu, indĂ©terminĂ©, mais son acte de langage nous plonge tout de suite dans le prĂ©sent vivant d’une narration oĂč il baisse la tĂȘte, ne mange ni ne parle plus et feuillette le dictionnaire, seul livre qu’il est capable dĂ©sormais de lire. Une impossibilitĂ© de parler, une impuissance Ă  dĂ©clarer, il n’y a rien Ă  dire, que de l’eau dans des souliers trouĂ©s, des amis eux-mĂȘmes silencieux, seulement des fureurs abstraites, non point hĂ©roĂŻques ni vives pour le genre humain perdu. On dit non, on pense non, un quotidien sans issue ronge le corps, on ne vit que cela, le sens physique du temps qui s’écroule entretemps passaient les jours, les mois » et une incessante mort anonyme annoncĂ©e dans les massacres des manchettes des journaux. C’est-Ă -dire, les redoutables puissances non dialectiques, inconscientes de ce qu’est aussi le contenu premier de l’étonnante ligne syntaxique de Vittorini, la rĂ©pĂ©tition[[Cf. Gilles Deleuze, DiffĂ©rence et rĂ©pĂ©tition, PUF, 1968, La rĂ©pĂ©tition pour elle-mĂȘme », les trois synthĂšses du temps, p. 125-153. Le travail de Gilles Deleuze est une source trĂšs importante dans l’élaboration de cet article. On utilisera certains de ses concepts créés notamment dans les livres suivants PĂ©riclĂšs et Verdi, la philosophie de François Chatelet, Minuit, 1988 ; L’image-temps, CinĂ©ma 2, Minuit, 1985 ; Bartleby, ou la formule », postface Ă  Melville, Bartleby, Flammarion, 1989 ; avec FĂ©lix Guattari, Mille plateaux, Minuit,1980 ; Qu’est-ce que la philosophie ?, Minuit, 1991.. Elle affecte une sorte d’ectoplasme lyrique qui dit Je tel un vide, un creux sans volontĂ© organique, Ă  force de vitesse, par parataxe, avec polysyndĂšte, surcharge d’interponction, prolepse du verbe et du dĂ©monstratif, procĂ©dĂ© adjectival ternaire, suppression d’article. On se dirait presque dĂ©jĂ  parmi les voix personnages beckettiennes, la catatonie larvaire de leurs corps couchĂ©s, corps-troncs, corps-tĂȘtes, sourds et muets. MĂȘme dans l’errance. A bicyclette, lĂ©gĂšre et clandestine, pour Molloy, Moran, Mercier et Camier, puis dans un fauteuil, en surplace, pour Hann, paralysĂ© et aveugle. Chez Vittorini ce sont les trains il y a la drĂŽle de lettre du pĂšre cheminot, il a quittĂ© Ăźle et femme, sans regret ni honte vis-Ă -vis de personne, il conseille donc Ă  Silvestro, dĂ©jĂ  fuyard quinze ans auparavant, d’aller rendre visite Ă  sa mĂšre pour sa fĂȘte, au lieu de lui envoyer des vƓux ; et il y a Silvestro qui va poster la lettre, Ă©tourdi semi-dĂ©pressif, et qui se retrouve Ă  la gare dans un wagon de troisiĂšme classe, indiffĂ©rent Ă  partir ou ne pas partir. Il suit, il ne peut que suivre une sensation de nostalgie d’enfance, non pas son enfance ; et les annĂ©es lointaines en Sicile, ce sont des rats, sombres, informes jusqu’à quinze fois trois cent soixante cinq », non pas prĂ©cisĂ©ment des souvenirs. On atteint des intensitĂ©s sensibles, il ne s’agit pas de figures, elles vont scander dans le voyage la pratique d’une sorte de mĂ©moire transcendantale du passĂ©, fondement » temporel impersonnel, Ă  la limite de l’oubli plus que du mythe d’un retour Ă  une quelconque initiation originaire. En fait, Silvestro ne descend pas vers sa terre ancestrale comme vers la palingenĂšse d’une bĂ©nĂ©fique entraille protectrice, il ne va pas non plus recharger les souvenirs Ă  l’aide d’une mĂšre retrouvĂ©e et d’un langage obscur Ă  interprĂ©ter par mĂ©taphore. Pas tellement obscure, cette langue litanique de la rĂ©pĂ©tition, rĂ©itĂšre le vertige de la mĂ©moire comme oubli, sans Ă©tat d’ñme ni psychologie, secouĂ©e par toutes les habitudes de l’extĂ©rioritĂ© – demi-sommeil, fatigue, faim d’un prĂ©sent qui passe. Cet Ă©tat chronique du temps, subi comme une nostalgie nĂ©vralgique, Ă  la fois dans le souvenir et dans l’en plus de maintenant », Ă  savoir dans une quatriĂšme dimension » non pulsĂ©e et flottante, on le sentira de plus en plus envahir l’autre Histoire tout au fil des pages pour y libĂ©rer, loin de toute prĂ©tention tĂ©lĂ©ologique de la raison, l’attraction inconnue, incertaine d’un agir diffĂ©rent, irrĂ©ductible aux reprĂ©sentations de la conscience, Ă  l’organicitĂ© de leurs rĂ©alisations physiques dans le quotidien. Giuseppe Verdi Comment Vittorini arrive Ă  tenir » un tel bloc d’espace-temps, il l’expliquait lui-mĂȘme en rappelant le double choc qui le traversa en 1936 d’un cĂŽtĂ©, les nouvelles des combats dans les montagnes espagnoles Ă  la radio, l’appel mas hombre tambour, mas hombre chant de coq, mas hombre pensĂ©e », et de l’autre, la Traviata entendue pour la premiĂšre fois Ă  la Scala. Il ressent lĂ  une puissance de vie qui ne trouverait un Ă©cho que dans la littĂ©rature amĂ©ricaine, certainement pas dans la rhĂ©torique du roman europĂ©en qu’il considĂšre malade, Ă  l’exception prĂšs de Proust, Joyce et Kafka, les grands expĂ©rimentateurs solitaires hors de toute intellectualitĂ© rĂ©flexive sans Ă©lan et du psychologisme ambiant oĂč il avoue ĂȘtre tombĂ© lui aussi avec L’Ɠillet rouge, son premier roman. Et de mĂȘme que Stendhal, Gogol, Pouchkine avaient fait Ă©voluer le roman sous le vent de la poĂ©sie », en composant comme un Ă©quivalent de la dramatique de la fusion des genres du Don Juan de Mozart, maintenant pour le romancier latin, il faudra arriver Ă  attraper ce quelque chose que l’opĂ©ra verdien tient avec sa musique s’agissant d’une action, mettons, de dĂ©part ou mĂȘme de fuite, nous ne voyons pas cette action dĂ©mentie par le long chant de ” partons, partons ” d’un chƓur de partants qui ne s’en vont jamais. Le langage de l’opĂ©ra verdien nous empĂȘche de voir l’invraisemblance et nous amĂšne Ă  voir la rapiditĂ© du dĂ©part, sa prĂ©cipitation, son drame ou sa comĂ©die dans cette hĂ©sitation mĂȘme ». On se dĂ©tache dĂšs lors de la rĂ©alitĂ© particuliĂšre, en annihilant les donnĂ©es de comparaison, et l’on rentre dans un monde possible, dans une rĂ©alitĂ© majeure, pour exprimer un maximum de dramatique, un maximum de comique, dans les plus petits drames, les moindres comiques du rĂ©el. DĂšs lors, l’harmonie musicale, produisant l’action sub-reprĂ©sentative, rĂ©flĂ©chit l’élĂ©ment vocal mĂ©lodique dans un ensemble instrumental et orchestral qui met en scĂšne la matĂ©rialitĂ© des corps et leurs interactions affectives – des attractions, des rĂ©pulsions, les attentes dans les chutes et vice versa – non pas les sentiments psychologiques d’états d’ñme individuels. Aujourd’hui, nous soulignerions la valeur matĂ©rielle et relationnelle de l’opĂ©ra verdien, et comment il ne nous donne ni le vĂ©cu ni le concept abstrait, mais l’acte d’une raison sensible », non pas universelle, qui instaure des rapports humains inĂ©dits dans une matiĂšre molĂ©culaire sonore. L’opĂ©ra nous ferait donc percevoir esthĂ©tiquement le sens littĂ©ral de matĂ©rialisme historique ». Si Vittorini construit son style sur ce modĂšle, c’est prĂ©cisĂ©ment en se rĂ©clamant d’un matĂ©rialisme orphelin de tout travail dialectique du nĂ©gatif, avec les armes d’une tension rationnelle qui met en mouvement les figures redondantes par excĂšs de lyrisme en les dĂ©pouillant. Il compose donc Ă  mĂȘme la matĂ©rialitĂ© sonore du langage, pour que puissent y surgir les affects des interactions de groupe irrĂ©ductibles Ă  la somme des psychologies individuelles qui le constituent. A sa maniĂšre il va ainsi greffer un autre ton dans la polyphonie de l’appel-limite, mas hombre
 Ethnie sudiste la relation virtuelle Florence, puis Naples, la Calabre
 et Silvestro dormant, se rĂ©veillant, Ă  nouveau endormi, arrive une matinĂ©e sur le ferry-boat vers l’üle, entassĂ© avec les petits Siciliens affamĂ©s, apathiques, lointains comme lui Il n’y a pas de fromage comparable au nĂŽtre » rĂ©pĂšte-t-il plusieurs fois en goĂ»tant finalement quelque chose, mais sa litanie ne concerne personne, et la rĂ©plique arrive tard, comme une balle perdue, vous ĂȘtes donc Sicilien, vous ? », tandis qu’une femme plaintive s’exclame Messine ! », et le petit ami des oranges ressasse Un sicilien ne mange jamais le matin. Vous ĂȘtes AmĂ©ricain ? » d’un ton si tendu et strident qu’il rĂ©pond que Oui », il est amĂ©ricain depuis quinze ans. On vient d’engager une conversation, le roman n’en sortira plus. Mais celle-ci se dĂ©robe tout de suite Ă  la bonne volontĂ© et Ă  la logique de la reconnaissance propre aux dialogues comme Ă©change d’idĂ©es ; elle montre par son absence de suite dans l’enchaĂźnement, ses associations de phrases dĂ©jĂ  faites, ses rappels dĂ©cousus, qu’elle n’attend jamais personne pour s’engager ; la conversation aussi se rĂ©pĂšte, et par lĂ  dĂ©voile le fond redoutable – habitudes, oubli, sentences d’une petite mort diffuse – de n’importe quel Ă©change d’information entre un Je et un Tu prĂ©tendument sui-rĂ©fĂ©rentiels qui communiqueraient de la sorte. On le perçoit tout de suite, sa puissance est dĂ©jĂ  dans et par son acte de parole interactif, qui propage, fait circuler l’onde d’une rumeur tantĂŽt agrĂ©able, tantĂŽt dissonante, toujours non personnologique, oĂč les je et les tu trouvent des places isolĂ©es et mutantes, non contiguĂ«s et indĂ©pendantes mĂȘme dans la proximitĂ©. Ainsi, Vittorini et Cesare Pavese[[Cesare Pavese, La letteratura americana e aliri saggi, Einaudi, Torino, 1968 ; cf. aussi Le mĂ©tier de vivre, Gallimard, 1958, tr. de M. Arnaud. transforment le roman italien sous le rĂ©gime fasciste, attirĂ©s par le fil de ces rĂ©pĂ©titions dissolues, jeunes et batailleuses » propres Ă  la conversation sonore des auteurs qu’ils traduisent – Faulkner, Dos Passos, Saroyan, Hemingway. Car ce sont justement ces derniers qui, dans leurs livres comme dans leurs scĂ©narios, ont rechargĂ© le terme du dĂ©fi de l’activitĂ© des mĂ©tropoles amĂ©ricaines. En faisant ressortir la conversation du salon mondain du cĂŽtĂ© de chez James et chez Proust, en la jetant dĂ©finitivement dans la prolifĂ©ration des rues, ils retrouvaient les personnages de l’étranger, de l’aventurier, du passant, du migrant dont la sociologie interactionniste de l’école de Chicago Parck et Wirth Ă  la suite de Georg Simmel avait fait les nouveaux hĂ©ros anonymes du commerce urbain. Ceux-ci tĂ©moignaient un plaisir d’association pour elle-mĂȘme, des rapports de proximitĂ© tout en restant distants, mobiles, en transit, qui dĂ©terminaient les intĂ©rĂȘts provisoires de chacun, suivant les bifurcations imprĂ©visibles des interactions ordinaires[[Sur le rapport entre la conversation et les phĂ©nomĂšnes d’écologie urbaine Parck, Wirth et aut., L’école de Chicago, Aubier,1979 ; sur la diffĂ©renciation entre la forme pure de la sociabilitĂ© dont la conversation est un symptĂŽme et la sociĂ©tĂ©, cf. G. Simmel, Sociologie de la sociabilitĂ© » in Urbi III, 1980. Ces travaux sont repris, aujourd’hui, par la sociologie interactionniste de John Gumperz, Engager la conversation, Minuit, 1989, et l’ethnographie de la communication d’Erwin Goffman, Façons de parler, Minuit, 1981, Les cadres de l’expĂ©rience, Minuit, 1991.. Dans le travail, le commerce et le fracas mĂ©tropolitain, on sentait foisonner des attitudes singuliĂšres, des postures de corps et des positions de mots en dĂ©sĂ©quilibre permanent, irrĂ©ductibles Ă  tout idĂ©alisme de la communication avec ses places et fonctions préétablies, Ă  interprĂ©ter par introspection l’idĂ©e pragmatique de la dĂ©mocratie amĂ©ricaine y passait avec son grain de folie, les dangereuses rumeurs qui courent la ville
 Vittorini le sait, lui qui ne cesse de se heurter Ă  l’acceptation d’une sociĂ©tĂ© provinciale disposĂ©e aux seuls idylles de la nature, et qui trouve dans la fiĂšvre anonyme, laborieuse de New York, son dĂ©sir de grand air » pour les villes du monde Pavese remarquera que Conversation en Sicile, n’était que le dernier chapitre, la conclusion des commentaires de l’Histoire brĂšve de la littĂ©rature amĂ©ricaine, Ă©ditĂ©e par Vittorini juste avant ; il refuse donc de faire dialoguer ses noirs siciliens hĂ©bĂ©tĂ©s dans le lent et fataliste dialecte sicilien mĂȘme pas dans le sens de la transfiguration chorale des pĂȘcheurs de Verga, tout en rompant Ă  la fois avec la langue Ă©levĂ©e de la prose d’art de la revue solariana » ; il centrifuge celle-ci dans les paroles quotidiennes et y dĂ©gage la cadence, le rythme des lignes relationnelles qui stylisent le mot archaĂŻque pour l’emporter dans une direction inĂ©dite. S’il y a, alors, une inspiration italienne » dans cette langue, on la trouverait plutĂŽt du cĂŽtĂ© de chez Svevo, qui charriait son bilinguisme comme moyen pour rendre dans une seule Ă©norme difficultĂ© » la vĂ©ritĂ© nouvelle ressentie dans les profondeurs de l’ĂȘtre, du cĂŽtĂ© de l’influence elliottienne de Montale, le devenir pierre et rocher d’une parole au milieu de la dĂ©solation ; de l’un Ă  l’autre, un continuum sĂ©miotique ardu ouvre l’écriture et fait le dehors matĂ©riel d’une vie non organique intense ; Vittorini reprend cela pour son compte, dans sa composition expressive qui pose la question en devenir d’une dĂ©mocratie directe », ou le dehors de la sociabilitĂ© dirait Simmel. Une projection indiscernable entre les petits vendeurs d’orange de Messine et les nouveaux migrants des villes USA. Et la conversation en Sicile monte
 On l’entend dans le train, pour le meilleur et pour le pire, la rĂ©signation des ouvriers et des journaliers, le soupçon paranoĂŻaque des deux carabiniers Moustachu et Sans Moustache, surtout le monologue dur du Grand Lombard sur le sens nouveau d’autres devoirs Ă  accomplir, pas seulement ne pas voler, ne pas tuer, ne pas ĂȘtre un bon citoyen » ; il ne demande pas de persuader ni de convaincre, il cherche, si bien que ces propos, bien compris, mal compris, sont Ă©videmment ramenĂ©s par les hi » amusĂ©s d’un petit vieux- brindille sĂšche » au bruit de fond de la voie ferrĂ©e. Et c’est encore la conversation qui rythme le quotidien des retrouvailles avec la mĂšre Concezione, affairĂ©e comme si de rien n’était Ă  nettoyer des harengs, et ainsi deux fois rĂ©elle », entre la foulĂ©e intermittente des souvenirs et l’humour ordinaire du prĂ©sent, qui se remodĂšlent rĂ©ciproquement dans la suite des rĂ©pliques. Sur le fil de ces interactions on se promĂšne par les taudis de misĂšre et de malaria, tout le long de la tournĂ©e de piqĂ»res de Concezione, jusqu’à ce que la rumeur de la vie du village nous laisse entendre la colĂšre du rĂ©mouleur Calogero, la douleur d’Ezechiele, la demande d’eau vive de Porfirio, tous les trois insurgĂ©s contre les souffrances du monde, tous les trois terminant leur conciliabule par une colossale beuverie Ă  la lumiĂšre d’acĂ©tylĂšne dans la taverne du gnome Colombe. Et quand les chansons des hommes tristes rebondissent dans un Vive » polyphonique ivrogne qui engloutit toutes les voix dans le partage humanitaire du genre humain offensĂ©, l’on se dirait dans l’euphorie sarcastique de la fugue du Falstaff verdien, tout dans le monde n’est que farce, tutti gabbati ! ». De la sorte Vittorini rĂ©ussit en mĂȘme temps Ă  sauver artistiquement la sonoritĂ© asignifiante de l’ñme conversationnelle et Ă  en dĂ©noncer sa conversion thĂ©matique en discussion d’opinions aux tons populistes complaisants qui rĂ©duit le fond commun prĂ©supposĂ© dans un consensus dĂ©clarĂ©. LĂ  oĂč la rhĂ©torique de bien-faire les figures pointe; et celles-ci ligotent toujours les hommes, mĂȘme quand elles voudraient » les sauver, insĂ©parables des forces rĂ©actives de leur signifiance Ă  reconnaĂźtre, toujours liĂ©e aux signifiĂ©s dominants, de leur subjectivitĂ© Ă  communiquer, toujours en prise sur un ordre Ă©tabli d’assujettissement mĂȘme s’il Ă©tait engendrĂ© dans le cƓur profond de la Sicile persĂ©cutĂ©e. Au dĂ©but Silvestro est muet dans son non-espoir, on le retrouve ivre et ça ne va pas mieux pour le rĂ©veil de sa conscience. Pourtant cela n’a pas d’importance, car c’est bien dans un devenir sans Moi » qu’il se trouve emportĂ© par le mouvement de la conversation avec ses formes de la compagnie, de la rencontre, de la ballade. C’est-Ă -dire ces zones de sociabilitĂ© pure, Ă  percevoir musicalement, suivant une interaction irrĂ©ductible Ă  ses conditions de possibilitĂ©, ses structures, ses situations et ses places sociales. Elle ne pensait pas Je suis, elle pensait Je fais » avait Ă©crit Vittorini dans la nouvelle fĂ©erique d’Erica, en esquissant par cette transitivitĂ©, sa formule prĂ©fĂ©rĂ©e Je suis dans un autre » s’agit-il d’un simple acte de parole autorĂ©flexif, Vittorini-sujet d’énonciation, relatant le temps rĂ©volu du voyage de Silvestro-sujet d’énoncĂ©, avec toutes les zones d’indiscernabilitĂ© rĂ©ciproque, pour le plaisir des analyses textuelles ? Sans doute, mais on est confrontĂ© davantage Ă  une formule constructiviste qui prolonge la fĂȘlure de la conscience rimbaldienne, Je est un autre », au sens oĂč le je et l’autre pourront exister seulement comme inclusion prĂ©dicative, acte d’un passage, rapport ; si bien que leur relation en mouvement prime l’impossible double intĂ©rieur et l’extĂ©riorise, pour le rendre irrĂ©ductible aux sujets Vittorini, Silvestro
 qui le composent, transformĂ©s eux-mĂȘmes en de simples positions. Certes, cette sensibilitĂ© Ă  la relation, ou matĂ©rialisme empiriste en lutte soit contre l’empirisme vulgaire, naturaliste, soit contre l’interprĂ©tation idĂ©aliste du rĂ©el, toujours nominaliste, ne peut naĂźtre que dans des conditions historiques d’urgence 1936-1945, pour faire voir Ă  travers l’humour noir du genre humain perdu l’impossibilitĂ© de continuer Ă  vivre sous cette domination-lĂ  ; toutefois, il ne s’agit que de conditions, qui dĂ©gagent sous le signe de la relation problĂ©matique, le nĂ©o-rĂ©alisme comme tendance, indĂ©pendamment des lieux communs sociologiques responsabilitĂ© publique, dĂ©couverte du milieu populaire et des difficultĂ©s de dĂ©limitation, des impasses, surtout pour le roman comme genre. Une nouvelle nĂ©o-rĂ©aliste » cinĂ©ma De la littĂ©rature au cinĂ©ma, on pense Ă  une autre conversation en Sicile, celle du premier Ă©pisode de PaisĂ . AprĂšs le dĂ©barquement alliĂ©, l’élĂ©ment historique au quotidien se dĂ©voile dans la confusion des langues – l’italien, le dialecte sicilien, l’amĂ©ricain Ă©changĂ© par allemand – sur la place d’un village, qui introduit le fond sonore de tout le film ; quand ensuite, dans le chĂąteau fort, la nuit, la jeune fille-guide reste seule avec le soldat amĂ©ricain, un trĂšs long plan-sĂ©quence fait sentir la matiĂšre des interactions entre les deux Joy parle et parle, demande Ă  Carmela si elle est fasciste, la touche, l’entraĂźne Ă  se dĂ©rober furieuse, par rĂ©pulsion ; Joy dit home », et Carmela rĂ©ticente, rĂ©plique come » comment, tandis que dehors une Ă©toile filante tombe, il faut vite faire un vƓu, mais Carmela comprend toujours autre chose. Elle sourit pourtant Ă  l’attraction de ces mots-sons pressants. Il lui montre une photo avec sa sƓur, il raconte de chez lui d’une voix de plus en plus atone venant d’un no man’s land, et pour bien lui faire comprendre ce qu’est une sƓur, il allume le briquet et reçoit en rĂ©plique un sorella » Ă©merveillĂ©. On atteint le point problĂ©matique qui seul intĂ©resse Rossellini ce qui s’est passĂ© entre les deux pour en arriver Ă  cet affect irradiant, cette concentration extrĂȘme sans plus de rapports avec l’histoire vĂ©cue de gens dans la guerre, les rĂŽles d’alliĂ©-nouveau conquĂ©rant et d’occupĂ©e rusĂ©e. Quand l’interaction arrive Ă  se dĂ©pouiller de ses lois attractives, rĂ©pulsives et vaut en elle-mĂȘme par son Ă©trange autonomie pure. On le saisit d’autant plus qu’un coup de feu retentit et Joy s’écroule, l’action se prĂ©cipite, ce qui va se passer devient elliptique, inorganisĂ©, mĂȘme le corps Ă©crasĂ© sur les rochers de Carmela dĂ©couverte par les Allemands, elle a tirĂ© sur eux – les AmĂ©ricains dehors ont entendu les coups de fusils, ils sont revenus
 – en voyant leur camarade, est-ce qu’ils pensent qu’elle l’a trahi ?. Filmer l’attente, c’était l’impĂ©ratif de Rossellini, mais l’attente chez lui n’est pas du tout ce qui va se passer, et qu’il faudrait rendre d’aprĂšs les lois d’une connexion logique tenant le spectateur haletant par le dĂ©roulement des faits ; l’attente rossellinienne est dĂ©jĂ  un fait en elle mĂȘme, l’image-fait » disait AndrĂ© Bazin[[A. Bazin, Qu’est-ce que le cinĂ©ma ?, Ed du Cerf, p. 250 et suiv. Les Ă©crits rosselliniens sont rĂ©unis in R. Rossellini, Le cinĂ©ma rĂ©vĂ©lĂ©, Flammarion, 1984., en reprenant un certain langage phĂ©nomĂ©nologique dans l’esprit du temps que Rossellini le thĂ©oricien ne dĂ©daignait d’ailleurs pas ; pourtant, cette image-fait comme attente irrĂ©ductible Ă  son dĂ©roulement, compose le secret d’un temps non chronologique, sa part toujours inaccomplie », virtuelle, son problĂšme vivant ou relation, et cela n’est jamais dĂ©jĂ  donnĂ© dans une sorte d’expĂ©rience sauvage qu’on devrait faire lever comme sens des choses visibles ; cela, il faut le construire Rossellini le praticien dans son affaire de pensĂ©e – du mental immanent et vivant – bien plus que du vĂ©cu, mĂȘme originaire, car celui-ci est toujours remis Ă  un transcendant interprĂ©tant. Reste toute la force des thĂšses de Bazin, notamment quand il dĂ©finissait PaisĂ  le premier film en tant que vĂ©ritable recueil de nouvelles; il citait lui aussi les AmĂ©ricains – Hemingway, Dos Passos, et Faulkner – sans pourtant parler des adaptations de leurs livres, comme dans le cas de la plupart des films qui rĂ©cupĂ©raient la nouveautĂ© d’une syntaxe dans la reprĂ©sentation d’actions enchaĂźnĂ©es suivant des schĂ©mas organiques forts, jugement moral compris ; il soulignait plutĂŽt un Ă©quivalent stylistique les ellipses, la dispersion des situations faibles, difficilement reconnaissables. En effet, les lacunes tissent dans PaisĂ , au-dessous de la chronologie de la libĂ©ration » amĂ©ricaine Ă  travers l’Italie, les postures, les positions, la syntaxe », d’un rĂ©seau de rencontres quelconques entre des soldats, des moines, des enfants, des femmes, des partisans, des pĂȘcheurs, parlant, vivant, rĂ©sistant ; et toutes ces relations convergent vers un point problĂ©matique, tĂ©moin de la persistance d’un secret qu’est-ce qu’il s’est passĂ© pour en arriver au GI noir atterrĂ© par la pauvretĂ© des sans-abris dans la grotte napolitaine, au cadavre qui coule sur le Po avec la pancarte partisan » sur le dos
 Alors l’image devient une situation optique et sonore pure », au-delĂ  des dimensions vĂ©ridiques des enchaĂźnements, pas du tout une dĂ©nonciation humaniste ou une rĂ©flexion sur la guerre, plutĂŽt un acte de fabulation dĂ©gagĂ© du document. La voix-off scande les Ă©tapes du film pour annoncer dans la derniĂšre scĂšne – cela s’est passĂ© l’hiver 44, quand vint le printemps, la guerre Ă©tait finie » -, l’intolĂ©rable vrai de l’histoire qui sonne aussi puissamment faux, transformĂ© dĂ©jĂ  en acte de fabulation devant les rĂ©sistants anonymes, les opprimĂ©s oubliĂ©s. Dans le cas qui nous occupe, entre Carmela et Joy, nous n’entendons que la matiĂšre brute, compliquĂ©e de leur parler ordinaire, nous ne voyons d’abord que des postures rĂ©pulsives et attractives, puis l’acte de fabulation rossellinien nous rĂ©vĂšle la scĂšne dĂ©pouillĂ©e des rĂ©sidus des prĂ©supposĂ©s implicites reliant les rĂ©pliques des personnages Ă  leurs formes subjectives. On en tire ce qu’on ne peut que voir, ce qu’on ne peut que dire dans toute conversation humaine, l’indicible-invisible inhumain ou surhumain, qui s’y recĂšle virtuellement, une lueur, une tendresse, et l’acte de parole entre les deux est basculĂ©, est devenu fabulatif devant eux, les entraĂźnant avec l’auteur et les spectateurs pour faire sentir l’intensitĂ© sonore vide »  un dĂ©sir qui ne serait plus qu’un avec l’acte de crĂ©er ? Le problĂšme sous-jacent, l’art de la rencontre nĂ©o-rĂ©aliste », consiste bien en ceci chercher Ă  composer l’Ɠuvre autour d’une idĂ©e mentale pour qu’une image quadridimensionnelle, photographie mĂȘme de l’air qui passe, rende visible un plus de rĂ©alitĂ© immanente. Et il s’agit d’une charge singuliĂšre et collective Ă  la fois, c’est-Ă -dire justement relationnelle, comme critique sensible du prĂ©sent historique. Il faudrait, Ă  cet Ă©gard, au moins Ă©voquer une autre ligne, la ligne d’ombre d’un nĂ©o-rĂ©alisme intĂ©rieur, de Pavese Ă  Antonioni, un lointain intĂ©rieur pas du tout intimiste, qui suscite l’impensĂ© comme question sur l’impossibilitĂ© pathologique d’un amour malade Ă  partir de l’anatomie minutieuse des Ă©checs et des malheurs des rencontres. Ce sera la question-voyance devant la vacuitĂ© malsaine de la bourgeoisie urbaine, la bonne sociĂ©tĂ© turinoise de Entre femmes seules et Les amies mais aussi Le diable sur les collines et La nuit, ou L’aventure, car le passage de la sĂ©cheresse lyrique du roman au film opĂ©rĂ© par le cinĂ©aste, moins qu’une adaptation, rĂ©vĂšle plutĂŽt une approche esthĂ©tique originale, telle un diagnostic clinique » du mĂȘme problĂšme ; et tandis que le style pavĂ©sien le traite par une conversation fĂ©minine pleine de renvois, d’implicites, de phrases faites et indĂ©cente, de tressaillements qui creuseront un vide » – l’image indicible de Rosetta suicidĂ©e -, chez Antonioni, le parlĂ© s’estompe, s’économise et le matĂ©riel conversationnel passe dans ses longs plans sĂ©quences qui disent ce qui vient aprĂšs » chaque rĂ©plique en tant que posture banale, en rendant ainsi la fabulation dans le constat sensible de l’invisible souffrance relationnelle des personnages. CinĂ©ma ou roman, de l’interaction matĂ©rielle Ă  la fabulation, les techniques changent, non le lien commun de cette pragmatique de la composition esthĂ©tique qui s’en inspire et tend les diffĂ©rents matĂ©riaux vers leur dehors, un mental en quĂȘte de sa propre musique au quotidien. Remarque pragmatique axiomatique ou constructivisme Combien Silvestro, perdu dans les montagnes siciliennes, en rentrant dans la conversation, en y devenant ivre, est le tĂ©moin-prĂ©curseur de cette dĂ©marche. Il dĂ©voile d’avance toutes les impasses propres au principe de coopĂ©ration qui fonde aujourd’hui la logique analytique de la conversation. Des impasses dont une telle logique aura bien besoin pour enliser la pragmatique Ă  l’intĂ©rieur des jeux linguistiques, avec leurs rĂšgles sur les conditions de vĂ©ritĂ© des Ă©noncĂ©s, les conditions de rĂ©ussite de l’énonciation[[Pour une approche analytique de la pragmatique de la conversation » on renvoie notamment Ă  Communications, n° 30, 1979, cf. surtout l’article de H. Paul Grice, Logique et conversation », p. 57-72.. Silvestro rĂ©clame Ă  sa mĂšre, Ă  propos du pauvre chinois vendeur de colliers, de cravates, toujours envoyĂ© au diable, des rĂ©ponses nouvelles et Ă©tranges, des tours de mots qui changent d’une maniĂšre ou d’une autre le cours de l’existence, mais il sent » tout de suite que celles-ci n’arrivent pas, ne peuvent pas arriver, elles seraient prĂ©orientĂ©es par la volontĂ© organique de sa conscience, dĂ©sormais rĂ©duite Ă  une simple façon de parler ; ce seraient des rĂ©ponses au lieu tout simplement de devenir juste des idĂ©es pour autre chose, au-delĂ  de la psychologie de la rĂ©cognition qui les standardise. Pour parler analytiquement, on serait au-delĂ  des rĂ©alisations de l’intention illocutionnaire du locuteur au moyen de la reconnaissance par l’auditeur de cette intention. Qu’on se rapporte aux maximes de Grice qui rĂ©activent linguistiquement certains principes de l’anthropologie pragmatique kantienne. Elles tournent autour de l’idĂ©e que toute contribution conversationnelle doit correspondre Ă  ce qui est exigĂ© au stade atteint par celle-ci, par le but ou la direction acceptĂ©s de l’échange parlĂ© dans lequel on s’engage, avec ces quatre rĂšgles associĂ©es a quantitĂ© que votre contribution contienne autant d’information qu’il est requis mais pas plus ; b qualitĂ© que votre contribution soit vĂ©ridique, n’affirmez donc pas ce que vous croyez ĂȘtre faux, n’affirmez pas ce pour quoi vous manquez de preuve ; c pertinence parlez Ă  propos, en sorte que votre contribution se rapporte au sujet de la conversation ; d maniĂšre soyez clair, ni obscur, ni ambigu, mais concis et ordonnĂ©. Cela s’appelle un Ă©change d’information, Ă  savoir une communication intersubjective, suivant une approche pragmatique qui ne considĂšre plus le langage Ă  partir d’une surcodification signifiante, mais continue nĂ©anmoins Ă  le formaliser, cette fois comme une axiomatique immanente qui trouve prĂ©cisĂ©ment dans la conversation son meilleur domaine de rĂ©alisation. En effet, le principe de coopĂ©ration en cache toujours un autre encore, et celui-ci est coextensif Ă  la parole ordinaire tout entiĂšre. On utilise la frĂ©quence de l’information et la subjectivitĂ© de la communication pour rĂ©pandre la redondance de vĂ©ritĂ© entre l’énoncĂ© et l’acte, et faire de tout speech-act une transmission d’ordre. Il ne s’agit mĂȘme plus de principe Ă  vrai dire, c’est le critĂšre immanent du fonctionnement de cette force rhĂ©torique qu’est l’action de langage. Des sujets reconnaissent le vrai, le consensus circule, propage la bonne volontĂ© de la parole, et la communication rĂ©vĂšle sa nature pas du tout idĂ©ale traiter la variabilitĂ© des interactions par leurs constantes rĂ©fĂ©rentielles, conatives, etc., les faire accepter, constituer dĂšs lors l’opinion majoritaire. Ce n’est pas de cette conversation lĂ  que demande Silvestro, lui dont la seule volontĂ© tĂȘtue est dĂ©sormais un affect qui, imperceptiblement, s’insinue comme potentiel du dialogue avec la mĂšre, ne reconnaissant pas les Ă©tranges rĂ©ponses, mais les rencontrant, avec la nĂ©cessitĂ© de les prolonger, de les consolider par la construction d’un autre agir. La voix scellĂ©e Ce potentiel, qui mine davantage les rĂ©sidus encore organiques et reprĂ©sentatifs de la description de Vittorini, vus par un Je narrant ses interactions et leur Ă©chec, se dĂ©plie dans le grand dialogue nocturne parmi les lumiĂšres du cimetiĂšre, entre Silvestro et le fantĂŽme du frĂšre Liborio, mort soldat, et vaticinant du profond de la terre. On rentre dans un accent dostoĂŻevskien, au moins dans le sens de Bachktine, qui soulignait comment son auteur avait repris certains dialogues sur le dernier seuil », trĂšs rĂ©pandus dans la littĂ©rature du Moyen-Age. Ils rĂ©unissaient le thĂšme de la mĂ©nippĂ©e carnavalesque et les mystĂšres du genre universel des ultimes questions et ils crĂ©aient ainsi des hĂ©ros entre la vie et la mort, la raison et la folie qui n’étaient plus que des voix retentissantes vis-Ă -vis de la terre et du ciel[[Mikhail Bakhtine, La poĂ©tique de Dostoievski, Seuil, 1970, Les particularitĂ©s de composition et de genre ». p. 220 et suiv.. Chez Vittorini, la situation exceptionnelle produit une vĂ©ritable situation d’indĂ©cidabilitĂ© entre les catĂ©gories du mode et de la voix celles-ci font voir et les paysages font entendre, les montagnes de la Voie LactĂ©e emplissent de jasmins Ă  la fois les nuits d’enfance avec le pĂšre cheminot jouant Hamlet dans les gares, et le maintenant avec les morts et les tuĂ©s qui surgissent des tombes et mettent en scĂšne la mĂ©moire du monde, les actions des rois, des opposants, CĂ©sars non Ă©crits, Macbeth non Ă©crits; lĂ , parmi les disciples, les partisans, les soldats, Liborio enfant parle Ă  une jeune fille et arrose un jardin, joue avec son frĂšre en culottes courtes
 Alors gronde la solitude de la terre, brasse la mĂ©moire historique et privĂ©e-existentielle dans un ferment polytonal qui dĂ©fie les mythes, la patrie et l’hĂ©roĂŻsme du sacrifice, chaque parole imprimĂ©e, chaque parole prononcĂ©e, chaque millimĂštre de bronze Ă©levĂ© ». Non seulement le sujet d’énonciation fait partie du sujet d’énoncĂ©, mais l’un dans l’autre, Vittorini-Silvestro, sont tellement rentrĂ©s dans cette quatriĂšme dimension optique et sonore pure, au-delĂ  du souvenir et de l’ici-maintenant, que tous les deux dĂ©pendent d’un tout autre sujet d’énonciation, je » collectif, Shakespeare du monde, tragique et bouffon Ă  la fois. C’est l’affabulation de l’étrange cortĂšge derriĂšre Silvestro – des charretiers et des chiens, le Chinois et le Grand Lombard, le petit ami des oranges,le rĂ©mouleur Calogero, des femmes de Sicile, Ezechiele et Porfirio,- qui rassemble les gens du voyage dans le discours indirect libre comme acte de parole du peuple sicilien ; non qu’il y ait de quoi ĂȘtre fier, car la noblesse de ce peuple ne cesse de se superposer Ă  son abjection au pied du monument aux morts oĂč tous seraient prĂȘts Ă  cĂ©lĂ©brer l’horrible clichĂ© de la grande femme nue en bronze. Alors la voix de Liborio jaillit en Silvestro, une voix obscure en basse sonore Ehm ! Ehm ! Ehm ! » Moustachu et Sans Moustache peuvent s’acharner une derniĂšre fois Ă  interprĂ©ter ; le mot est scellĂ©, il frĂŽle matĂ©riellement le silence devant l’existence offensĂ©e et rĂ©sonne Ă  la limite commune des actes de parole autorĂ©flexifs ou interactifs. C’était ainsi depuis le dĂ©but, car toutes les conversations entre les gens ou dans une seule et mĂȘme personne, dĂ©jĂ  se laissaient bien parcourir par un tel implicite qui n’en est pas un, le secret du problĂšme » Ă©gal au silence, Ă  travers les composantes du rĂ©cit, par intensification syntaxique. On le saisit jusqu’au niveau de la structure constitutive de la narration, la forme onomastique des personnages et des villages, des villes aussi, Siracusa, Spaccaforno, Modica, Genesi, Donnafugata, Vittoria, Girgenti
 La musique de la rĂ©pĂ©tition les extrait de leur Signifiance en tant qu’unification substantielle et reprĂ©sentative de l’énonciation, comme de leur subjectivitĂ© significative en tant qu’individuation par figures, si bien que Sicile ou Perse et Venezuela ce serait la mĂȘme chose », car le nom de ces villes et de leurs hommes rĂ©pĂ©tĂ©s tantĂŽt dans le prĂ©sent du voyage et de son habitude, tantĂŽt dans le passĂ© d’une mĂ©moire subie comme enfance de l’oubli, assume toute sa finitude dans l’utopie des villes mĂ©tropolitaines Ă  bĂątir, oĂč les personnages et les paysages urbains se connectent, indiscernables, grĂące au contrepoint syntaxique pour ne plus ressembler qu’à des mĂ©lodies prises dans des rythmes. Le retour Ă  la mĂšre » aussi, dans sa tendresse hors conscience, est d’abord et surtout un nom propre, mĂšre Concezione, puis MĂšre-melon, MĂšre-reine, MĂšre-abeille, MĂšre-vache, MĂšre-oiseau des gĂ©missements, des sifflotements, parfois une roulade – il importait seulement qu’elle chantait, elle devenait oiseau, la mĂšre-oiseau de l’air et, dans ses oeufs, la mĂšre-oiseau de la lumiĂšre
 » ; et des noms propres deviennent de mĂȘme le fifre » et le cerf volant », les souliers trouĂ©s et l’eau vive, les Nuits des hommes nus dans le Vin, l’Ermite et le Chinois. On a voulu y lire des symboles ; peut-ĂȘtre, si on leur donne la valeur qu’invoquait l’un des inspirateurs de Vittorini, Lawrence une intense pensĂ©e des flux, un processus d’action et de dĂ©cision sub-reprĂ©sentative, toujours au milieu, sans origine, finalitĂ© ou interprĂ©tation possible, prĂ©cisĂ©ment lĂ  oĂč les relations prennent leur vitesse pour devenir un vecteur vers le cosmos, le problĂšme vivant[[ Lawrence, Apocalypse, Balland, 1978, prĂ©face de Fanny et Gilles Deleuze. C’est Vittorini le traducteur italien du Serpent Ă  plumes.. C’est que le mot scellĂ©, ehm !, ehm !, ehm !, Ă©vide la tension syntaxique des rĂ©sidus didascaliques et sauve la puissance collective du langage on parle, redoutable par ses dĂ©sirs, ses mutations de masse », en l’arrachant Ă  la dimension des actes de parole en tant qu’ordres. L’acte de parole s’est dĂ©robĂ© Ă  la forme de la reconnaissance qui enlise sa force active dans celle rhĂ©torique de la domination ; il n’est plus qu’une formule dans sa tentative-limite de trouver une issue au devenir intense du langage, en le faisant taire, il le sauve pour que dans son dehors, il insiste. La conversation en Sicile finit comme elle avait commencĂ©, Ă  la cuisine. Silvestro dit Je pars », Concezione demande sans Ă©tats d’ñme s’il reste pour dĂźner, et un acte de fabulation qui ne cesse de dĂ©gager la relation, introduit entre les deux une troisiĂšme silhouette elle donne au rĂ©el le plus que le dernier seuil du roman a su crĂ©er. Vittorini construit par lĂ  sa nouvelle image de cinĂ©ma nĂ©o-rĂ©aliste, elliptique, en hiatus, entre plusieurs plans mentaux » un homme pleure ou dort de dos, tes pieds dans une cuvette, les cheveux blancs, trĂšs vieux, la tĂȘte basse ; il est un peu idiot comme Silvestro au dĂ©but, bien qu’avec une autre fatigue, celle des voyages et voyages accomplis, avoir fait le mouvement par une force obstinĂ©e de continuer, il s’agit peut-ĂȘtre du grand-pĂšre, ou du pĂšre de retour, ou bien du passant aimĂ© autrefois par Concezione, le passant-arpenteur, Ă  travers les terres siciliennes, jamais plus revenu aprĂšs une grĂšve dans les soufriĂšres
 L’un et l’autre se taisent et le Grand Lombard insiste en eux, le seul qui avait saisi dans le mot scellĂ©, la tension pour le nouveau devenir d’une conscience » fraĂźche
 Et le Grand Lombard un Sicilien, sans doute un Lombard ou un Normand de Nicosia, de haute taille et les yeux bleus, pas jeune, la cinquantaine, parlant le dialecte avec ses u lombards, de ces localitĂ©s lombardes du Val Demone, Nicosia ot Aidone » reste le nom propre multiple, distributeur de la gĂ©ographie du roman. Il Ă©tire son dialecte vers la psalmodie du Ehm » au seuil du silence, mĂ©morable personnage par Ă©nergie et puissance, catalyseur d’une rĂ©sistance Ă  consolider grĂące Ă  la grandeur mĂȘme de l’angoisse de Macbeth, de la folie d’Othello et de la bouffonnerie gĂ©nĂ©reuse de Falstaff, c’est-Ă -dire l’inspiration shakespearienne de Verdi, ou ce en quoi le roman est encore pieux. Ceci ce n’est pas une < < conversation sacrĂ©e » Est-ce pour cela que Italo Calvino dans de belles pages sur l'utopie rationnelle de Vittorini[[Italo Calvino, Progettazione e letteratura » in Menabo'10 1967 ; Viaggio, dialogo, utopia », in Il ponte, 1973. Michel Serres dans son livre EsthĂ©tiques. Sur Carpaccio, Hermann, 1975, dĂ©die une intĂ©ressante Ă©tude Ă  la Conversation sacrĂ©e » du MusĂ©e de Caen. trouve le modĂšle de sa conversation dans l'approche picturale et visuelle des conversations sacrĂ©es des tableaux de la renaissance vĂ©nitienne ? LĂ  aussi, chez Bellini et surtout Carpaccio, la limite du silence est peinte Ă  travers une litanie rĂ©pĂ©titive de plans - sur le fond, Venise et ses ponts, le commerce laborieux et marchand, comme grand englobant, le pont de Saint JĂ©rĂŽme-l'ermite, au devant, la table de l'agapĂ© avec les bienheureux, et dans le bras de Marie, contemplative, l'enfant JĂ©sus appelant par le geste le petit Jean-Baptiste, au milieu des autres transversales de connexion. Tout un mouvement immanent s'insinue dans la conciliation anthropocentrique de l'humain et du divin avec la ville Ă©talĂ©e, jusqu'Ă  l'harmonieux chiffre universel de la mĂšre et de l'enfant les anachorĂštes, les ermites se confondent idĂ©alement aux vĂ©nitiens quelconques, ils traversent les ponts, sillonnent, construisent des espaces de rencontres quotidiens qui s'Ă©chappent de l'espace universel et allĂ©gorique, invariant du sacrĂ©, la cĂ©lĂ©bration du Verbe engendrĂ©. En ce sens, la litanie rĂ©pĂ©titive de Vittorini est la ballade, le mouvement immanent de la rencontre, car cette pauvre femme-mĂšre qu'est Conception, pleine de temps, d'humain genre passĂ©, enfance et autre, des hommes et des fils, pas du tout de l'histoire », ne contemple plus Liborio mort lĂ©gionnaire en Espagne, simplement elle en fait sentir la tendresse de rage, ehm » ehm », la texture de la voix pour qu'une dĂ©cision de conduite jusqu'alors impensĂ©e surgisse, non pas pour une quelconque cĂ©lĂ©bration de l'incommunicable silence avant toute conversation. Matter of fact », Ă©crira Vittorini dans les notes de son essai Les Deux tensions Ă©dition posthume, infra-reprĂ©sentatif, jamais dĂ©jĂ  lĂ , toujours Ă  construire. Ce serait donc plutĂŽt Ă  la maniĂšre de CĂ©zanne, l'expĂ©rimentateur des densitĂ©s et forces physiques, matĂ©riellement impensĂ©es, et invisibles le verre de CĂ©zanne... sa tension qui ne procure rien d'autre encore que de la tension ». Et d'ailleurs, il se peut que dĂ©jĂ  la peinture vĂ©nitienne savait rendre cette matiĂšre, par composition de lignes transversales d'avenir, autonomie de la couleur, indĂ©pendamment du code byzantin signifiant et de son rĂ©cit religieux les figures et postures statiques de la narration. Elle devient maintenant la scĂšne sonore de l'Ɠuvre que nĂ©anmoins Vittorini rendra visible avec son propre matĂ©riel de composition ayant le mĂ©lodrame seul comme modĂšle. A partir des forces enfouies dans la matiĂšre brute du parler ordinaire la parole se lĂšve des villes, elle se consolide par d'autres ponts, d'autres figures », JĂ©rĂŽme l'ermite devient le Grand Lombard de passage, et l'Etranger, le Migrant, l'Exclu, autant de personnages de rencontre comme possibilitĂ©, inspiration mĂȘme de rapports humains inĂ©dits, en contretemps de toute rhĂ©torique de la communication intersubjective, ou de sa mise en abĂźme. Cette conversation matĂ©rielle » que guette Vittorini dans sa recherche de l'Ă©crivain-CĂ©zanne, hors des plaisirs de la communion, de l'exaltation et de la distension, cette conversation-question est la construction modelante, productrice d'un sens inter-sensoriel », inter-intellectuel » et inter-perceptif », qui fait inĂ©vitablement Ă©crouler les rĂ©sidus du discours autoritaire et despotique de la fonction-auteur, les dangers de naturalisme humaniste de la narration. Syntaxe Vittorini n'Ă©crira plus d'Ɠuvres achevĂ©es, Ă  l'exception de Uomini e no[[Vittorini lui-mĂȘme critique dans son Journal en public le mauvais choix du titre pour la traduction française Les hommes et les autres qui risque une interprĂ©tation humaniste manichĂ©enne. Il insiste sur le caractĂšre inclusif, problĂ©matisant et non oppositif, de l'inhumain dans l'humain Des hommes et non., le roman de la lutte partisane dans l'hiver 44 Ă  Milan. DĂ©jĂ  dans celui-ci, trĂšs marquĂ© par la lutte de la contingence historique telle qu'elle risque de se figer dans les avatars d'une morale de l'engagement, d'ailleurs ressentie mĂȘme dans le phrasĂ© dialogique, trop prĂšs des modules narratifs amĂ©ricains, les pages les plus fortes se dĂ©tachent du livret, comme ses prĂ©ceptes romanesques, concernant la charge informative, la tension objectiviste et la nouveautĂ© formelle, finissent par se dĂ©composer la charge, la tension et la nouveautĂ© entraĂźnent forme, information et objet dans une vie matĂ©rielle et relationnelle non rĂ©fĂ©rentielle, en-deçà du volontarisme du message, au-delĂ  du Moi et du Toi des mimĂ©sis humanistes, suivant un impĂ©ratif catĂ©gorique Ă  l'infinitif, pour des voix devenues atones Tu avais Ă  attendre ? », Il ne s'agissait que d'attendre. N'Ă©tait-il pas simple que j'attende ? », C'Ă©tait simple », C'Ă©tait trĂšs simple. De mĂȘme l'Ă©tait rĂ©sister... », Il n'y a rien d'autre Ă  faire », Et il te suffit Ă  toi, qu'il n'y ait rien d'autre pour continuer ? Tu peux continuer ? », Je peux continuer ». Continuer mĂȘme toujours et toujours rĂ©sister ? ». Et si les personnages rythmiques vittoriniens les plus rĂ©ussis sont souvent des vieux ou des vieillards comme le Grand Lombard - ainsi l'Ă©tonnante Garibaldienne » de retour Ă  son immuable pays archaĂŻque, dans la chorale nocturne au tempo d'un opĂ©ra buffa » pour voix malveillantes aux balcons... -, c'est que tous agissent leur corps et leur parole par cette sorte de force matĂ©rielle persĂ©vĂ©rante qui fait le mouvement - des catalyseurs de lente Ă©nergie extĂ©rieure, des individualitĂ©s comme relation Ă  venir. MĂȘme et surtout le grand pĂšre monumental du Simplon fait le clin d'Ɠil au FrĂ©jus, qui autrefois bĂątit des ponts, des chemins de fer et des tunnels, peut-ĂȘtre aussi le ColisĂ©e, la Muraille de Chine, les Pyramides, et maintenant, Ă  peine supportĂ© dans la famille dĂ©munie de la fille Ă  la pĂ©riphĂ©rie de Milan, se tait, n'Ă©coutant que les rĂ©cits de son ami terrassier sur les Ă©lĂ©phants, leur humeur tenace, patiente... Le peuple stoĂŻcien des Ă©lĂ©phants, Ă  la rencontre d'un mourir content, en retrait, dans leurs mystĂ©rieux cimetiĂšres. Jusqu'au beau matin que grand-pĂšre, en recommençant Ă  causer d'un sombre fracas de pierres dans la gorge, est Ă©lĂ©phant, dans le parc de Lambrate, au dehors, en s'Ă©loignant lentement, en saluant avec la canne Ici, ce n'est pas l'Afrique ; on est au milieu des arbres, mais on entend tout autour, des tramways ; on arrive au bord d'un Ă©tang, mais aussi, Ă  des fontaines de bronze ; on arrache une branche de genĂȘt, mais on donne un coup de pied dans une boite en fer blanc oĂč il y eut des sardines ; et l'on grimpe des pentes de sable, des dunes, d'oĂč l'on entrevoit, lointains et pourtant proches, des pinacles de fer. Court ici Ă  travers le fil du tĂ©lĂ©phone, chargĂ© de conversations, et si l'on prĂȘte l'oreille, peut-ĂȘtre que l'on entend un Ă©cureuil, l'on entend un liĂšvre, mais on entendra plus souvent des voix qui appellent d'un numĂ©ro " qui est Ă  l'appareil ? ", se demandent les hommes ici, Ă  travers. Ils s'appellent l'un l'autre, l'un frappe Ă  l'autre et d'ici, c'est aussi cela que l'on entend, ou, aussi, on entend siffler brusquement le train, le cri de mille de mes semblables qui passent en train et Ă  la fois de moi-mĂȘme qui sais leur passage par un bois dans un train. Pourtant, c'est ici que je cherche quel pourrait ĂȘtre le sens de ces temps oĂč l'on serait vraiment des Ă©lĂ©phants. Non point, donc, de la façon dont peut l'avoir Ă©tĂ© grand-pĂšre ? Non point de la façon dont peut l'ĂȘtre grand-pĂšre ?... je m'enfonce dans les feuilles et la rosĂ©e, je m'imprĂšgne de rosĂ©e, je m'imprĂšgne de feuilles, je marche et j'en viens Ă  penser que ce pourrait ĂȘtre merveilleux, des baies rouges de plantes piquent le vert mĂȘme sous mes pieds, de rouges corails, et de l'herbe tout autour d'autres herbes bondit, gicle, saute, dans un mouvement en Ă©ventail qui est une crĂ©pitante transmutation d'herbe en grillons et de grillons en herbe, de grillons en rosĂ©e, de grillons en feuilles. Mais j'en viens aussi Ă  penser que c'est prĂ©cisĂ©ment ici, non ailleurs, non en Afrique, non dans des forĂȘts vierges, que ce serait merveilleux, pour ce qui, ici, est ville la voie ensevelie sous les orties et qui est une joue appuyĂ©e Ă  la ville, non pas seulement une joue appuyĂ©e aux plantes ; si bien que je voudrais que survienne dans des bois comme ici, Ă  Milan, Ă  Paris, c'est-Ă -dire aprĂšs la ville, non pas avant, un temps oĂč l'on serait des hommes-Ă©lĂ©phants, sereins Ă  l'Ă©gal des Ă©lĂ©phants, mais libres et non pas de quelqu'un, non pas d'un sĂ©rail, mĂȘme au prix d'ĂȘtre lourds comme les Ă©lĂ©phants le sont, trapus, balourds, fumant des cigares comme eux, s'ils fumaient, et non plus des danseurs gracieux, des prestidigitateurs comme nous le sommes[[E. Vittorini, Le Simplon fait un clin d'Ɠil au FrĂ©jus, Gallimard, 1950, ch. III; traduction modifiĂ©e.. » L'Ă©crivain-CĂ©zanne, selon Vittorini ? Faire davantage le mouvement, avec le matĂ©riau intense d'une syntaxe-sensation qui compose sa propre rĂ©fĂ©rence, la gĂ©ographie d'un peuple qui manque encore dans la variation conversationnelle des voix de tout corps, une fois ayant dĂ©jouĂ© les rĂ©sidus anthropocentriques, ce qu'on appelle par habitude herbe et grillon, voyageurs et cheminĂ©es des villes futures. Alors, le vieillard Ă©lĂ©phant se prolonge dans des Erica nouvelles, c'est Rea Silva, la lĂ©gĂšre ambulante des Villes du monde qui sillonne une Sicile perçue stratigraphiquement, le lieu de passage d'une gĂ©ologie cosmique, remĂ©morante dans les foules anonymes du passĂ© - Bible, HĂ©rodote ou Mille et une nuits - les civilisations urbaines Ă  venir ; ou il s'agit de l'Ă©tudiante en mobylette des pages inĂ©dites, ĂȘtre de fuite parmi un entrelacement d'allusions, de chuchotements de la jeunesse mĂ©tropolitaine comme si la lenteur sage du mouvement Ă  la limite de la conversation, ne cessait de passer dans sa vitesse hors parole, quand elle se dĂ©robe aux clichĂ©s du consensus et devient une idĂ©e qui pointe dĂ©jĂ  au dehors. PrĂ©cisĂ©ment lĂ  oĂč duretĂ© et tendresse font le double devenir de la jeune fille et du vieux. Industrie » et didactique de l'expĂ©rimentation Tout cela, qu'on ne le croie pas sentimental ou Ă©motif, Vittorini le cherche de plus en plus du cĂŽtĂ© conjectural » d'un processus de connaissance libĂ©ration », dit-il. Le pragmaticien constructiviste se dit toujours rĂ©aliste et il appelle ses hĂ©ros des personnages de fonction. Pour nous, au sens oĂč les procĂ©dĂ©s mathĂ©matico-scientifiques, loin de renvoyer Ă  des donnĂ©es formĂ©es, composent par leurs fonctions crĂ©atrices du vivant en pleine transformation, tout un matter of fact technologique qui affecte avec ses accĂ©lĂ©rations, les interactions homme-machine. ... Le monde industriel, c'est encore un monde que nous ne possĂ©dons pas et qui nous possĂšde exactement autant que le monde naturel. Il doit donc subir une transformation ultĂ©rieure qui le prive du pouvoir de nous dĂ©terminer. Or une littĂ©rature qui serait pleinement Ă  la hauteur de la situation contiendrait l'exigence de ce passage ultĂ©rieur... l'Ă©crivain sera au niveau de l'industrie seulement dans la mesure oĂč son regard se sera pĂ©nĂ©trĂ© de cette exigence[[E. Vittorini, Il Menabo, n° 4, 1960, » A partir, donc, du constat de l'abolition de la diffĂ©rence entre industrie et nature, et contre les idĂ©ologies de la vieille conscience, notamment celle sacrale, humaniste de la rhĂ©torique italienne, Vittorini se jette dans l'Ă©laboration d'une pensĂ©e in progress qui oscillera toujours entre l'illusion positiviste d'une science comme nouvelle totalitĂ© » et les instances d'un marxisme critique de sa rĂ©ification inhĂ©rente. Compte ici la pratique d'une crĂ©ation artistique en tension vers un plus de connaissance non calculĂ©e Ă  l'avance, qui se rapporte aux fonctions matĂ©rielles nouvelles de la pensĂ©e scientifique, afin qu'elles inspirent ses propres compositions, les purifiant de ses Ă©motions rassurantes. DĂšs lors l'approche artistique de Vittorini, de Rossellini aussi, comme d'une maniĂšre justement cĂ©rĂ©brale de Antonioni, va essayer de brancher sur nos connaissances renouvelĂ©es, une sorte de sensation vitale et non subjective de passion pour la rĂ©alitĂ© plus forte du rĂ©el, qui suggĂšre dĂ©jĂ  par son hyperfonction constructivisme une politique de rĂ©sistance par le fait mĂȘme de demander des voix physiques, soient-elles atones ou aphasiques, au moins affranchies de vieilles croyances, archaĂŻsmes moraux ou Ă©lans populistes... C'est pourquoi Vittorini et Rossellini notamment, tout en Ă©tant fascinĂ©s en ce qui concerne le roman, par l'Ă©cole du regard », sa dĂ©nonciation des vieux registres sentimentaux » et l'affinement technique d'un percept qui fusionne dans la connaissance matĂ©rielle des formes, s'en dĂ©tournent comme s'ils y pressentaient le danger d'un reste de nĂ©o-naturalisme, un arrĂȘt du mouvement non plus de l'homme mais de l'imaginaire-fantasme cf. la critique faite Ă  de Robbe Grillet dans Les deux tensions. Et tandis que Vittorini plonge dans son travail obscur et sans aboutissement sur l'interaction sonore, Rossellini, lui, demandant un peu moins de complaisance et de cruautĂ©, renonce au cinĂ©ma, et se lance dans son idĂ©e humble et folle Ă  la fois de films pour la tĂ©lĂ©vision. RĂ©apprendre Ă  nous tous, Ă©tourdis par les horreurs du siĂšcle et les conquĂȘtes technologiques, l'alphabet et le langage, suivant une didactique qui rĂ©active le terme d'information et retrace le progrĂšs des connaissances humaines, tel est le projet de Rossellini. DĂšs lors il oppose une didactique de la question Ă  la pĂ©dagogie d'une vĂ©ritĂ© toute faite qui se propagerait dans le consensus de l'information-clichĂ©. Ainsi recharge »-t-il, de fait, l'anonymat et le silence de Vittorini il Ă©tait touchĂ© par la tendresse » de son questionnement en nous indiquant la voie du traitement crĂ©ateur propre Ă  toute forte tentative de rĂ©alisme constructiviste ». De L'Age du fer aux Actes des ApĂŽtres, au Blaise Pascal, Ă  La prise de pouvoir de Louis XIV, l'esprit du progrĂšs humain, tragique et pourtant saisi comme pensĂ©e en devenir plutĂŽt que comme histoire, est mis en scĂšne suivant une succession de tableau de conversation- rĂ©union » entre Paul et les apĂŽtres, rĂ©pliques serrĂ©es entre Louis XIV et Colbert... Ce sont des conversations irrĂ©ductibles Ă  de simples dĂ©bats d'idĂ©es, oĂč les acteurs toujours un peu dĂ©collĂ©s d'eux mĂȘmes, permettent aux voix et aux arguments qui les modulent d'ĂȘtre plus physiques »[[Ce sont des mots qu'on emprunte Ă  la belle analyse de Raymond Bellour, Le cinĂ©ma, au-delĂ  », in Rossellini Cahier du CinĂ©ma, 1990, p. 82-88. Ă  l'intĂ©rieur de la succession de plans lumineux et de plans d'ombre. Ceux-ci, faisant voir la dramatisation progressive, par sautes, par raccourcis des affinitĂ©s profondes qui rendent productives les interactions, permettent Ă  l'idĂ©e nouvelle de surgir, imprĂ©visible Ă©mergence non pas en dehors de la conversation, mais de son propre dehors-force... Ainsi cette incarnation du processus de connaissance, l'impensĂ© vivant cachĂ© derriĂšre le quotidien socialement et historiquement donnĂ©, que Rossellini voulait nous raconter en simple didacte », passe dans la sensation suscitĂ©e. Il se fait acte artistique de fabulation comme mĂ©moire du monde, acte de perpĂ©tuer la vie, en repensant mĂȘme les fonctions scientifiques par son propre moyen une conversation fabulĂ©e. On sait d'ailleurs comment ce travail rossellinien a Ă©tĂ© une importante source d'inspiration pour la didactique de l'image de Godard. On la dira acte de lĂ©gende », acte toujours renouvelĂ© de la lutte des hommes comme oeuvres d'art, Ă  condition de comprendre comme » non pas Ă  la maniĂšre d'une mĂ©taphore mais d'une tension limite, faite d'impasses, d'incomprĂ©hensions, de dĂ©terminismes fĂącheux entre les oeuvres et la rĂ©sistance des hommes. Une telle logique secrĂšte est la relation Ă  contre-temps du consensus de l'Ă©poque, son impensĂ© vivant qui dĂ©termine ce qu'on appelle des conduites du dehors - esquisses de plans, tentatives processuelles peu soucieuses de finalitĂ© et de compĂ©tences disciplinaires, exposition dangereuses au flou de l'indĂ©terminĂ© - dans les passages indiscernables de l'oeuvre Ă  la vie, oĂč l'on apprend Ă  se dĂ©faire sans douleur de soi-mĂȘme et devenir justement une relation. C'est tout au moins notre idĂ©e de Vittorini le sicilien autodidacte, suivant les Ă©tapes de sa conduite. D'abord militant, puis opĂ©rateur culturel dans la reconstruction d'aprĂšs guerre la revue Il politecnico, et dĂ©couvreur de jeunes talents chez Einaudi quand l'idĂ©e d'une maison d'Ă©dition laboratoire n'Ă©tait pas encore Ă©touffĂ©e par les techniques de marchĂ©, ensuite essayiste social libertaire plutĂŽt que libĂ©ral dans les bouleversements du miracle Ă©conomique » Il menabo' autonomie culturelle dans l'engagement, politique dans la science, recherche individuelle dans le travail d'Ă©quipe... Et toutes les fois que sa reconnaissance publique fige le problĂšme des postures sociales du dehors dans la solution de simples figures d'activisme soit-il gĂ©nĂ©reux, il y a retrait, rebondissement sur l'Ă©criture, et apprentissage des nouveaux langages avec leurs rapports inĂ©dits signifiant/signifiĂ© » cf. ses exercices d'Ă©pistĂ©mologie, d'anthropologie et de linguistique dans Les deux tensions... afin que l'acte d'une ligne syntaxique les fasse fuir loin du danger d'assimilation de la part du nouvel ordre social. Contre celui-ci non plus la Sicile offensĂ©e, Milan 1966 et pourtant... on rĂŽde encore autour d'une variation consersationnelle, et dans cette variation lĂ , on travaille et on attend, Ă  savoir, on fait tout ce qu'on peut afin de prĂ©cipiter » une posture du dehors, opĂ©ra » pour le monde. So you want to write a fugue ? » DĂšs lors, on parlerait d’un tournant post-verdien qui prolongerait la virtualitĂ© de l’accent de Vittorini, sa rythmique imprĂ©gnĂ©e des gĂ©odĂ©siques italiennes un plateau de terres rouges, arides par grandes extensions, sans arbres, brĂ»lĂ© par les vents, par le souffle du soleil et du sel, haut de terres rouges, coupoles et tours, Ă  travers le dĂ©sert des hommes voyageurs ». Sans doute, sur la ligne de la mutation des seuils perceptifs, Ă  l’interfĂ©rence des diffĂ©rentes pratiques le gai savoir veut l’incompĂ©tence laborieuse, on trouverait la nouvelle polytonalitĂ© dĂ©jĂ  du cĂŽtĂ© de l’écholalie d’Arnaud. Puis on retrouverait, pĂȘle-mĂȘle, la subconversation amoureuse de Nathalie Sarraute, les modulations de Beckett, Bob Wilson ou Carmelo Bene, la voyance sonore dans la nouvelle image de Godard, Rivette, Rohmer, ou les voix-voyeuses » de Duras
 autant d’expĂ©rimentations autonomes qui prolongent cette pragmatique du non style faite de conversation et de fabulation, Ă  condition que celle-ci ne cesse de transformer celle-lĂ  en force arrachĂ©e aux formes consensuelles de l’échange comme dĂ©bat ou aussi comme lutte » de simples opinions, la base de la conception populiste d’une dĂ©mocratie Ă  l’occidentale. Il est question ici d’essayer de rĂ©apprendre Ă  Ă©couter une fugue, expĂ©rience musicale et mode de vie. Glenn Gould l’explique trĂšs bien en conseillant de nous exercer Ă  percevoir les diffĂ©rentes impressions vocales simultanĂ©es du final du Falstaff, comment tous les mots et les syllabes n’y sont pas audibles, ne comptant dĂ©sormais que par les consonances et les dissonances du timbre des voix, leurs attaques, leurs chutes, leurs courbes. Car sur ces lignes contrapuntiques se rĂ©vĂšlent dĂ©jĂ  les virtualitĂ©s de nouveaux vocalismes chromatiques qui libĂšrent le langage de la structure phonologique signifiante et le son, de l’empreinte du chant qui le tient ». La saisie de ces rapports de la voix et du son, changeant la perception qu’on a d’habitude du langage et de la musique, nous donnent la chance d’attraper des informations » bien plus importantes que nous n’en sommes nous-mĂȘmes convaincus. Mais alors, c’est la fugue verdienne elle-mĂȘme qu’on arrache aux rĂ©sidus romantiques du bel canto avec leur fusionnement trop facile dans une foule toujours lĂ . Sous cette caution astucieuse, Gould nous prĂ©sente le premier volet de ses documentaires dramatiques » ou radio contrapuntique, La trilogie de la solitude[[L’expĂ©rimentation crĂ©atrice de Glenn Gould est trop mĂ©connue. Elle comprend d’autres documentaires et notamment des portraits- fabulĂ©s » sur deux interprĂštes, Stokowski 1970, Casals, 1973, et deux compositeurs Schoenberg the firsi hundred years, Fantasy-Documentary 1974, Richard Strauss, the bourgeois hĂ©ros 1979. Elle se prolonge aussi dans l’image cinĂ©matographique, soit dans le rĂŽle de crĂ©ateur de bande musicale de film The wars, Nielsen Fems and Torstar que dans celui de metteur en scĂšne et interprĂšte collectif, notamment in Radio as Music 1975, Portraits de Glenn Gould, Chemins de la musique, 1974 et Glenn Gould joue Bach 1981, les deux derniers prĂ©sentĂ©s, produits et rĂ©alisĂ©s par Bruno Monsaingeon. Bruno Monsaingeon a rĂ©uni les Ă©crits gouldiens qui servent ici de rĂ©fĂ©rence Glenn Gould, Le dernier puritain, 1983, Fayard ; Contrepoint Ă  la ligne, 1985 ; Non, je ne suis pas du tout un excentrique, 1986 On le remercie vivement pour nous avoir fourni les enregistrements de la Trilogie. Sur la radio contrapuntique de Gould cf. aussi G. Payzant, Glenn Gould, un homme du futur, Fayard, 1983 ; et dans Gould pluriel, Courteau, 1988, Un examen de la Trilogie Solitude » de Roberts.. Une jeune femme commence Ă  parler trĂšs doucement plus nous avancions dans le Nord, plus cela devenait monotone », and the further north we went, the more monotonous il became », mais further » glisse dans le farther and farther North » plus loin, encore, dans le Nord d’une deuxiĂšme voix masculine qui raconte sa mĂ©fiance vis-Ă -vis de tous ceux qui se vantent de leurs prouesses, voyages en traĂźneau au PĂŽle Nord, par exemple ; et tout cela devient pleinement intelligible seulement aprĂšs coup, quand elle arrĂȘte de dominer le son en prononçant trente jours » pour disparaĂźtre tout de suite, une sorte de point de convergence Ă  la Webern », dans une autre qui dit onze ans » en introduisant le rĂ©cit de son isolement dans la rĂ©gion, celui de la transformation de sa vie. Quitte Ă  ce que la premiĂšre voix revienne par un croisement du genre tapisserie auditive » 
 et je pensais que je faisais presque partie de ce pays, partie de cet environnement paisible et j’espĂ©rais que cela ne finirait jamais ». Il n’y a que des textures vocales Ă  dĂ©couvrir, elles se font compagnie », embarquĂ©es dans un train trĂšs peu vittorinien Ă  vrai dire, dont la rumeur en basse continue Ă©voque – murmure de neige et ours polaires – le dĂ©part de Winnipeg pour Fort Churchill au Canada c’est le prologue en trio de The Idea of north. Glenn Gould produit sa radio quand il arrive au parachĂšvement de son plan pour l’abolition des applaudissements et des manifestations de toute espĂšce ». Loin de l’arĂšne des concerts, oĂč le rapport artiste public ne relevait plus pour ce surdouĂ© du piano que de la complaisance et de la reconnaissance voyeuriste, le studio d’enregistrement lui avait dĂ©jĂ  permis de recrĂ©er les oeuvres de ses musiciens prĂ©fĂ©rĂ©s par les technologies les plus avancĂ©es de montage, mixage et encadrement acoustique. Ce sont les auteurs fin de siĂšcle » qui avaient brassĂ© par leur pluristylisme les figures utiles seulement pour les dĂ©bats acadĂ©miciens suivant une Ă©volution prĂ©tendue telle du systĂšme modal au tonal et Ă  la musique atonale Orlando Gibbons, entre l’anonymat homophonique de la prĂ©-renaissance et la nouvelle subjectivitĂ© harmonique baroque, Schoenberg entre la sĂ©rie et un retour Ă  une sorte de pseudo-tonalitĂ© ; et toujours Bach le fuguiste, Ă  une Ă©poque oĂč cet art Ă©tait dĂ©sormais bien dĂ©raisonnable, Bach la pensĂ©e-musique qui vanifia les dogmes artistiques, les questions de goĂ»t et la frivolitĂ© des prĂ©occupations esthĂ©tiques. PrĂ©cisĂ©ment ces compositeurs, tous Ă©galement indiffĂ©rents vis-Ă -vis de la sonoritĂ© particuliĂšre de l’instrument-interprĂšte, historiquement conventionnel, Ă  la recherche d’une stimulation pour une oreille interne active, capable de se greffer sur des matĂ©rialisations sonores en forme hyperstructurĂ©e, entraĂźnent l’élaboration gouldienne de la participation et de la responsabilitĂ© multiple dans l’expĂ©rimentation Ă©lectronique. Il s’agit d’arriver Ă  combiner, en les dĂ©passant, les fonctions spĂ©cifiques du compositeur, de l’interprĂšte et du consommateur, qui pourra se transformer lui aussi en manipulateur expĂ©rimentĂ©, non seulement de cadrans et boutons, mais davantage des filtres, des vitesses et des hauteurs, des modulateurs, Ă  partir de son propre travail sur l’expĂ©rience acoustique quotidienne
 On sait, Ă  ce propos, combien le goĂ»t de Gould est loin de l’alĂ©a » de John Cage pourtant les deux se retrouvent ensemble Ă  la pointe de cette conduite du dehors consistant Ă  s’embarquer dans une exploration de la densitĂ© sonore, de la tessiture timbrique de l’environnement quotidien. LĂ  oĂč l’on saisit pragmatiquement mĂȘme les cadences des Ă©noncĂ©s humains dĂ©barrassĂ©s de tout sujet d’énonciation lĂ©gifĂ©rant. Ainsi, tous les deux se tournent vers la conversation, comme en y prĂ©sentant un au-delĂ  ou en-deçà de l’idĂ©e commune de musique qui les entraĂźne hors de leur art » Cage dans la conversation-processus du happening la situation de cirque », oĂč l’on ne communique aucune reconnaissance, oĂč l’on n’informe pas sur des objets, bien qu’on rentre dans les sons et dans le souffle-silence, c’est-Ă -dire dans la cessation de texture comme autre son et bruit de la danse ; et Gould dans la conversation-fugue de sa radio. On le dit le dernier puritain », il rĂ©torque que oui, il est bien le tenant d’une tradition de siĂšcles de lĂ©gislation contrapuntique, mais pour pouvoir en faire ressortir la puissance non historique dĂ©jĂ  lĂ  dans les Cris de Paris de ClĂ©ment Janequin, les Cris de Londres de Weekles et Gibbons. C’est toute une structure mentale composĂ©e de rapports d’affirmation, de rĂ©ponse, de dĂ©fi et de riposte, d’appel et d’écho, qui concernent le secret des lieux immobiles dĂ©tenant la clef de la destinĂ©e des hommes ». En effet, ces procĂ©dĂ©s fuguĂ©s du sujet » et de la rĂ©ponse, la conversation entre basse, alto, tĂ©nor, soprano, Ă©taient formulĂ©s depuis le dĂ©but de la Renaissance, donc bien avant la mise en place de la grammaire tonale de tension et de dĂ©tente qui, par ses effets de contrastes rĂ©glĂ©s, les rĂ©duira Ă  une dimension d’équilibre et de pesanteur Les contrapuntistes de la Renaissance ont Ă©tĂ© les premiers hommes pratiques en tant que compositeurs Ă  reconnaĂźtre qu’il Ă©tait possible, faisable et rĂ©aliste de croire l’oreille susceptible de saisir plusieurs rapports simultanĂ©s, de suivre leurs divers cheminements et d’ĂȘtre Ă©galement mobilisĂ©e par eux tous
 Ils comprirent qu’on pouvait transformer en musique cette compote environnante qui aujourd’hui peut-ĂȘtre pour la premiĂšre fois est en train de devenir ” musique “. » Si donc Gould s’intĂ©resse Ă  l’avenir incertain de l’art de la fugue comme rĂ©alisation musicale, Hindemith dans notre prĂ©sent post-tonal, c’est surtout pour y dĂ©celer le symptĂŽme d’une densitĂ© venant d’ailleurs, le devenir d’un mouvement incessant irrĂ©ductible aux systĂšmes qu’il traverse. On Ă©numĂ©rera avec Gould ses principales caractĂ©ristiques dissonances modulatoires propulsives en rapport indĂ©cidable avec le thĂšme Ă  la limite du tempĂ©rament, disposition de grands Ă©tages harmoniques de modulation sans critĂšre de dĂ©veloppement fixe, leur insoumission aussi Ă  la lĂ©gislation catĂ©gorique masculin-fĂ©minin de la tonique et de la dominante propre Ă  la symphonie classique, concentration inachevĂ©e des airs sur un matĂ©riel furtif, Ă  l’aide de fragments mĂ©lodiques changeants bien qu’à densitĂ© continue, variĂ©tĂ© des textures productrice aussi de la prĂ©gnance du silence des voix 
[[Gould, La musique de ProtĂ©e ou quelques observations sur le caractĂšre “subjectif ” de la forme fuguĂ©e » in Contrepoint Ă  la ligne, cit., Gould a composĂ© aussi une fugue canonique » dont il a Ă©crit Ă  la fois la musique et les paroles, So vou want to write a fugue CBS, 1977. Il en parle Ă  Monsaingeon dans l’un de leurs films de 1974 comme d’un morceau en mouvement Je suis parti des fonctions historiques de la fugue, je les dĂ©monte et puis les dĂ©molis
 Les bons thĂšmes comportent un contre-sujet. Celui-ci avait pour mots Never be clever for the sake of being clever
 A la fin de la fugue il reste un peu de contrepoint, mais il s’épuise de lui mĂȘme. Il y a dans tout cela du En attendant Godot ». Cf. Payzant, Gould, un homme du futur, cit. L’évocation du théùtre de Beckett qui fascinait Gould pour son utilisation intĂ©grĂ©e du silence n’est certes pas gratuite. Monsaingeon rappelle comment les derniĂšres annĂ©es Gould envisageait de se consacrer Ă  une oeuvre littĂ©raire Ă  venir » que ses Ă©crits philosophiques, fictionnels et critiques ne faisaient qu’annoncer.. Ces composantes syntaxe rendent Ă  la fugue son sens de variation constante, encore qu’il s’agisse d’un type de variation particuliĂšrement nomade », et pour cela mĂȘme la tendent vers son dehors qui seul la justifie, cette structure mentale pas du tout dĂ©sincarnĂ©e, parce que toujours questionnante la compote » de l’environnement quotidien qui fait la rumeur de la vie des interactions humaines, chansons, bruits, et cris
 La structure mentale fuguiste se rĂ©active ainsi naturellement » dans l’enregistrement qui seul est Ă  mĂȘme de notre rumeur quotidienne de plus en plus Ă©lectronique. DĂšs lors, Gould conjugue l’ascĂšse du voyage sur place Ă  la vitesse de la technĂš qui va lui permettre d’attraper la puissance d’accĂ©lĂ©ration et de ralentissement matĂ©rielle sonore. Il se penche Ă  l’écoute de tout filtrage de la musique de fond ordinaire, Ă©mission tĂ©lĂ©, pub, cinĂ©ma, et il y dĂ©couvre les rĂ©sidus des clichĂ©s de plusieurs idiomes savants, employĂ©s jusqu’à l’atonalitĂ© mĂȘme de certaines sciences-fictions, s’insinuer en prĂ©sence sonore superposĂ©s aux banalitĂ©s conversationnelles de nos existences. Comme si nous ne cessions de parcourir l’expĂ©rience associative directe de tout le vocabulaire accumulĂ© depuis la renaissance, ses maniĂ©rismes, ses conventions, ses occurrences statistiquement plus frĂ©quentes. C’est ainsi, indĂ©pendamment de notre compĂ©tence consciente », mais on ne pourra plus produire rien de nouveau sinon en ayant affinĂ© les sensibilitĂ©s Ă  partir de cet acquis acoustique. Et si les sons comme les voix continuent Ă  nous bombarder dans une seule et mĂȘme interaction hertzienne, d’aprĂšs la banniĂšre du gigantesque clichĂ© que la transmission simultanĂ©e, le direct des mĂ©dias actionnent en redondance de contrĂŽle, l’enregistrement gouldien, lui, se dĂ©finit comme une action Ă  distance, dĂ©tournant le brouillage et la rumeur de sa production. Il rejette Ă  l’arriĂšre plan la reconnaissance des clichĂ©s langagiers et musicaux et il s’en sert Ă  la maniĂšre d’un cadrage dans sa composition qui transforme leur temps historique en une topographie, une gĂ©ographie de la relation oĂč les voix, les sons, la musique de fond machinent » un seul et mĂȘme continuum sĂ©miotique de pensĂ©e, d’action et de mouvement. Le relief le plus acĂ©rĂ© du rĂ©el dĂ©tourne ainsi cette vitesse sĂ©miotique qui est notre religio » contemporaine, vers l’appel d’une vocation plus haute », the Idea. Syntaxe Ă©lectronique ethnie nordique Et l’on reprend Ă  Ă©couter. Une infirmiĂšre, un gĂ©ographe sociologue, un anthropologue, un bureaucrate nous informent dans un anglais canadien courant de leur diffĂ©rentes expĂ©riences directes du Nord, et de leur attitudes, l’enthousiaste, la cynique, la tourmentĂ©e et la dĂ©sillusionnĂ©e, suivant des voix enregistrĂ©es sĂ©parĂ©ment. Pourtant, par le traitement sur la bande de certains rĂ©sidus des diffĂ©rents monologues qui subissent le filtrage d’une chambre sonore unique, ces voix se dĂ©tachent de la basse continue du train, et s’engagent dans la plus mentale des conversations. Elle nous fait sentir moins le message que son effet d’expansion d’air sonore qui entraĂźne les voix par des bifurcations, des dĂ©tachements, des isolements dans la contiguĂŻtĂ© du contrepoint, oĂč chaque rĂ©plique sert de tremplin Ă  l’autre, y recueillant les brins qui lui plaisent pour attraper son idĂ©e. On dĂ©rive d’une conversation Ă  l’autre, on y participe vraiment en serveur de wagon-restaurant » qui peut se faire, lui aussi, juste une idĂ©e sur la nuit obscure de l’ñme humaine » ou la fabulation de la Fugue vers Le Grand Nord. Ce qu’une cinquiĂšme voix, idĂ©aliste et pragmatique, enthousiaste et sans illusion, contenant Ă  la fois toutes les autres, fait monter dans une sorte de tonalitĂ© sereine qui vire au gris atone des cieux canadiens. Il ne s’agit pas du tout d’un sujet Narrateur, plutĂŽt de la nouvelle basse comme fondu » nĂ©cessaire Ă  cette radio encore en monophonie 1966 pour qu’elle rende la structure intĂ©grĂ©e de la densitĂ© d’un bloc sonore. Elle devient ainsi un simple air mĂ©lodique, une ligne de conversation dĂ©sormais libĂ©rĂ©e du vĂ©cu des scories des opinions personnelles ; elle est transformĂ©e en paysage » qui entre dans le contrepoint, non plus d’autres voix humaines mais du dernier mouvement de la cinquiĂšme symphonie de Sibelius. Celle-ci, complĂštement manipulĂ©e dans l’enregistrement, est devenue Ă  son tour une rĂ©pĂ©tition productive, un simple rythme, personnage rythmique ». La musique et la voix humaine se tendent donc rĂ©ciproquement et les deux entrouvrent leur thĂšme entre voix et son, dans une sorte de conversation cosmique qui rend indĂ©cidables les personnages et les paysages, les rythmes et les mĂ©lodies, un seul bloc Ă  mĂȘme la sensation du territoire nordique il serait intĂ©ressant, Ă  cet Ă©gard, d’approfondir le projet d’une telle entreprise avec les manipulations radiophoniques qui s’ouvrent Ă  la connexion avec le cosmos de Stockausen, dans Spirale ou PolelExpo ; mĂ©taphore de la condition solitaire », dit Gould suivant une façon de parler que sa pratique fait nĂ©anmoins exploser en fabulation d’un processus d’anonymat crĂ©ateur, qui est dĂ©jĂ  en soi-mĂȘme une Ă©cologie de l’esprit. Comment habitera-t-on en poĂšte » le territoire ? 
 Peut-ĂȘtre les Esquimaux, ou les Terre-neuviens, the Latecomers, ces bardes retardataires en train de converser sobrement sur leur vie de village, l’anarchie de leur collectivitĂ© insulaire, d’oĂč Gould extrait une cadence vigoureuse, une Ă©lĂ©gance mĂ©trique qui se transforme en motif contrapuntique par rapport au continuo hypnotique des diffĂ©rentes sonoritĂ©s du bruit des vagues. En revenant sur ses Ă©missions, Gould tenait Ă  souligner comment l’effet des dialogues et des trios de The latecomers lui paraissait moins dramatique que dans le North, Ă  cause de l’usage de cette technique du fondu, qui avait Ă©tĂ© si importante en monophonie, mais qui se relativise dans les entrecroisements droite/gauche, les simultanĂ©itĂ©s sonores et les rapports inĂ©dits entre l’échelle du temps et la voix propres Ă  la stĂ©rĂ©ophonie mĂȘme la quadriphonie ne devrait faire, d’aprĂšs lui, qu’accentuer cela au lieu d’ĂȘtre traitĂ©e comme surcharge d’ambiance ; si bien que la fonction d’un narrateur, nĂ©cessaire en mono comme simple Ă©quivalence de fondu, risque en stĂ©rĂ©o de s’attribuer une fĂącheuse allure de sujet d’énonciation porteur d’un jugement et interprĂšte des faits relatĂ©s
 DĂšs lors qu’on peut sĂ©parer les personnages en les plaçant en avant ou en arriĂšre-plan, Ă  gauche ou Ă  droite, ou dans le temps, le silence devient un stimulus singuliĂšrement puissant » Or, celui-ci, indĂ©pendamment de l’autocritique gouldienne, superpose dĂ©jĂ , dans la sĂ©quence finale au moins, son mouvement propre Ă  celui du ressac de la mer, et explore, autonome, la densitĂ© intensive du nouveau volume sonore, sans souci de proportion avec la durĂ©e du son. On le sent » fonctionner comme contrepoint des conversations terre-neuviennes, dĂ©sormais Ă©cholaliques grĂące au filtrage, car c’est le silence seul qui inspire la voix de Leslie Harris, transformĂ© de narrateur en simple personnage de fonction. Ainsi, dans le cadre sonore, il peut se dĂ©placer, se heurter avec toutes les autres voix et y soutirer l’idĂ©e/thĂšme, les traversant toutes l’en-deçà et l’au-delĂ  des diffĂ©rentes conversations Ă  propos des traditions de l’üle, du prix Ă  payer pour le non-conformisme
 Une idĂ©e/thĂšme, ou la question de qu’est-ce que serait la composition d’un groupe original dans un milieu culturel de plus en plus coercitif. Leslie Harris disparaĂźt, devient vague, le cadre sonore est envahi, ses vitesses se composent en infinie lenteur rythmique qui fait voir autant qu’écouter le mode de vie terre-neuvien comme territoire Les gens sont bĂ©ats Ă  l’idĂ©e de rejoindre le courant. Je trouve cela assez absurde, car le courant me semble, Ă  moi du moins, plutĂŽt fangeux. Et le procĂ©dĂ© se rĂ©pĂšte une derniĂšre fois, tout en en se raffinant, dans la piĂšce The quiet in the land 1977 qui, elle aussi, semblerait se prĂ©occuper davantage de nous informer, de nous documenter sur le mode de vie des Mennonites de Red River au Manitoba, leur tension entre l’idĂ©al de rester en contact avec le monde tout en conservant ses distances et le repliement exclusif sur la quĂȘte de leur foi. NĂ©anmoins le message y est si Ă©purĂ© par le contrepoint asignifiant des rumeurs des voitures et des cloches, des jeux d’enfants et du chƓur religieux, d’une chanson rauque de Janis Joplin et de la Suite numĂ©ro cinq pour violoncelle de Bach emploi perfectionnĂ© des prises de son multiples, filtrage par modulateurs temporels, que cette radio de la vitesse mentale gouldienne intensifie la charge informative de l’émission et le principe moral mennonite comme mot d’ordre, les ouvre vers une sonoritĂ© affective et perceptive pure qui est aussi une image Ă  construire on a remarquĂ© Ă  juste titre la composition cinĂ©matographique des programmes gouldiens. Gould parle de la manipulation sonore comme d’une tricherie crĂ©atrice. C’est son idĂ©e de didactique rĂ©aliste », car l’image fonctionne seulement si la technique d’écoute transforme la production pour en faire son propre usage. On peut s’y exercer facilement, mais la rĂ©ussite dĂ©pend de la plus stricte des conduites de la part de l’auteur, des voix des personnages et de l’auditeur mĂȘme devenir autant de singularitĂ© et de positions sur la ligne relationnelle qui, elle seule, peut rendre sensibles les nouveaux chromatismes signifiants et les nouveaux percepts signifiĂ©s ». Relation en acte image mentale On retrouve toujours le paradoxe de la conversation fabulĂ©e que les compositeurs rĂ©alistes » savent crĂ©er techniquement, bien qu’indiffĂ©rents aux genres artistiques, tous, musiciens, Ă©crivains, cinĂ©astes ou peintres attirĂ©s par cette matiĂšre non linguistiquement formĂ©e – continuum sonore et visuel des mouvements de vie – que le contrepoint conversationnel recĂšle comme dehors de chaque technique. Ils nous demandent de poursuivre l’affaire, rentrer dans une image physique en acte, tantĂŽt sonore pour y saisir la kinĂ©sie visuelle Ă©criture et musique, tantĂŽt visuelle pour y saisir la modulation sonore qu’est-ce que le tableau La conversation de Matisse ?, tantĂŽt les deux cinĂ©ma ; dedans, les personnages se refusent Ă  l’interprĂ©tation en termes de sujet ou d’objet de reconnaissance ; ce sont des fonctions Ă  la maniĂšre de Vittorini, des fonctions rythmiques toujours en prise sur des motifs territoriaux, ou bien des personnages conceptuels plus encore que des figures » esthĂ©tiques comme dit Deleuze, tellement Gould parle d’un devenir philosophe par le voyage au Nord, vĂ©ritable territoire absolu de la pensĂ©e – ils tĂ©moignent d’un processus de connaissance incertain, notre impensĂ© vivant contemporain, structure mentale rigoureuse car problĂ©matique, mais sans didascalie organisatrice Leslie Harris est composĂ© par les mille six cents collures nĂ©cessaires Ă  rendre fluide les conversations enregistrĂ©es de son double » existant – une voix fluide », Ă  savoir en constante variation sonore, au-delĂ  des signifiances et des signifiĂ©s Ă©noncĂ©s, et hors prise de l’incommunicabilitĂ© plaintive qui n’est rien d’autre que le ratĂ© nĂ©cessaire Ă  la forme d’un message, Ă  la subjectivitĂ© des personnes impliquĂ©es. On sort du petit cĂŽtĂ© de l’interaction quotidienne qui fait son mauvais cinĂ©ma, Ă  savoir la reprĂ©sentation organique consensuelle, et l’on dĂ©samorce la grande peur collective de l’opinion comme mot d’ordre, dans la nouvelle conversation contrapuntique bonne Ă  nous dire la seule chose dont on ait besoin aujourd’hui, l’isolement d’un acte de crĂ©ation », aussi discret soit-il. On s’isole, c’est-Ă -dire on s’égale Ă  la relation productrice, au sens oĂč Glenn Gould est dĂ©jĂ  la polypersonne cf. la verve humoristique de la ScĂšne, virulente dĂ©nonciation radio du concept de compĂ©tition, physique, cĂ©rĂ©brale, contre le temps et la mort mĂȘme. Elle se rĂ©fracte dans le matĂ©riau Ă©lectronique, en faisant surgir l’exigence d’une autre teneur d’existence. Quand les voix sont dĂ©sormais indiscernables de la rĂ©alitĂ© de territoires comme cartes de passage », beaucoup plus que des fantasmes d’identitĂ©s distinctives Ă  organiser. Alors on y est, dans l’image mentale de la voix-off, c’est le dehors sub-externe » Artaud plus profond de toute intĂ©rioritĂ©, l’isolement du North, la population sicilienne. Leslie Harris fait un clin d’Ɠil Ă  Silvestro Grand Lombard, sans prĂ©supposĂ©s, sans sous-entendus. Un clin d’Ɠil-mot de passe, on ne peut en dire plus, on risque le clichĂ© contre quoi tous les deux se battent, au rythme d’une solitude qui demande le ferment collectif et vice et versa. On n’est plus simplement dans la radio » ou le roman. La psalmodie de l’ ehm » de Liborio Ă  la limite d’un agir diffĂ©rent, sert de contrepoint Ă  l’épuisement du bruit Ă©merveillĂ© des vagues nordiques, les matĂ©riaux langagiers et sonores, par leurs syntaxes, tendent la rĂ©pĂ©tition de la vanitĂ© des conversations des hommes vers le silence, et ils en sauvent ainsi l’informel vivant on est des habitudes, de la mĂ©moire oublieuse, de la finitude ; ils composent un seul et mĂȘme bloc d’espace/temps de vision, et ils continuent Ă  empoigner », coup sur coup, – Sud, Vieille Europe ou Terre Neuve mode d’emploi de l’Ɠuvre » – la souffrance contingente des mots d’ordre qui asservissent nos pratiques dans l’opinion. Vittorini et Glenn Gould, aux deux bouts de notre quotidien contemporain on pourrait, certes, remarquer leur incompatibilitĂ©. Et continuer Ă  en critiquer les dĂ©marches respectives, cela a Ă©tĂ© fait, discutĂ© et communiquĂ©. Mais les gĂ©nĂ©ralitĂ©s des dĂ©bats et des discussions savantes qui ramĂšnent l’un aux impasses d’un volontarisme populaire, l’autre Ă  la quĂȘte d’une mystique sans corps, se dĂ©roulent trop souvent d’aprĂšs l’idĂ©e d’une conversation rĂ©flexive comme Ă©change rentable d’idĂ©es, avec les prĂ©supposĂ©s, les conflits, les persuasions qui renvoient Ă  l’affirmation blasĂ©e des certitudes personnelles. Juste Ă  cela Gould et Vittorini ont toujours su Ă©chapper, affairĂ©s plutĂŽt dans la construction d’une autre idĂ©e de conversation-limite sur le fil de la matĂ©rialitĂ© du rĂ©el, la relation Ă  vivre comme unique abri une vitesse de joie, l’incommunication est une politique. Ils se rencontrent, fuguistes nĂ©s, suivant l’art de la tension intramusicale, physique et mentale, voix et son, Ă©criture et modulateurs, qui passe toujours dans des conditions et sprechgesĂ€nge secrĂštes », en acte. L’Ɠuvre rebondit, l’auteur devient ombre parmi d’autres silhouettes inaperçues ; elles traversent ensemble le monde des possibilitĂ©s humaines, et telles insistent ; obstinĂ©es et irrĂ©cupĂ©rables par le MarchĂ© du prĂ©sent. Passerone Giorgio Chercheur Ă  l'UniversitĂ© philosophique europĂ©enne, est le traducteur en italien de Mille plateaux. Ledivan Hall Halla Moi j'ai pas A la bien Comme une bouteille Ă  la mer MĂ©lancolique anonyme - Featuring Diam's - Pas de vidĂ©o clip Interlude Soprano et Mino - Pas de vidĂ©o clip Tant que Dieu - Featuring Mino - Pas de vidĂ©o clip M.A.R.S. - Featuring Mino - Pas de vidĂ©o clip La famille - Featuring LĂ©a - Pas de vidĂ©o clip Welcome - Featuring Psy4 De La Rime - Pas de vidĂ©o Écouter les20 plus grand tubesAjouter Ă  la playlistHalla HallaDarwaHiroC'est Ma LifeEn FeuLe Diable Ne S'habille Plus En PradaFreestyleLe DivanMĂ©lancolique AnonymeBombe HumaineWelcomeFerme Les Yeux Et Imagine-ToiPuisqu'il Faut VivreLa Colombe Et Le CorbeauCrazySur La LuneStarting BlockChĂąteaux De SableJe RĂȘvaisCe Qu'on Laisse À Nos MĂŽmes Jeregardais la video "comme une bouteille Ă  la mer" en live,le clip "moi j'ai pas" et presque tout ce qu'il faisait avec les psy4delarime qui Ă©tait super Ă  l'Ă©poque Si on suit ses titres Paroles Encore une prise de bec avec ma mĂšre J'fais le sourd, claque la porte Pour oublier j'ricane avec mes potes en tapissant un block Le visage plongĂ© dans les Ă©toiles, noyĂ© dans ma gamberge J'cherche une Ăźle, une berge, ou au moins un bout d'bois J'me sens, comme une bouteille Ă  la mer J'vais oĂč l'flot de la vie m'mĂšne Loin de tout, mĂȘme de ma mĂšre La vie m'a offert la solitude de Robinson J'voudrais repeindre ma vie, mais je n'trouve pas le bon pinceau Certains ont fait le grand saut, mariĂ©s, des enfants Nous lĂąchent leurs discours de rĂ©ussite, leur vie est mieux qu'avant C'est ce qu'ils nous disent J'vois d'la lassitude dans leur regard Mais eux au moins ont essayĂ© d'sortir de leur brancard Moi, j'ai l'impression d'avoir ratĂ© des tas de trains Pourtant je n'ai jamais quittĂ© l'quai La preuve, les jeunes me squattent, ça craint Le temps a soufflĂ© sur ma vingt-cinquiĂšme bougie J'en suis mĂȘme pas sĂ»r J'suis toujours dans le mĂȘme logis, dans la mĂȘme logique Le piano des Feux de l'Amour pour m'rĂ©veiller La petite sƓur pour m'faire Ă  grailler Brailler, j'l'ai fait pour un rien Pour m'calmer j'rappe, d'autres roulent VoilĂ  nos deux moyens aĂ©riens, une femme Des fois j'me dis que c'est la plus grosse arnaque d'la vie d'un homme Certains disent qu'une d'elles viendra un jour Ă©clairer mon ombre J'espĂšre le voir d'cet angle Pour l'instant les couteaux qu'j'ai sur mes omoplates ont des traces de rouge Ă  ongle Mais bon, la vie faut la vivre, donc j'la vis Fuis les vitres brisĂ©es d'mon existence Continue, navigue, mĂȘme dans l'vide J'vire Ă  tribord, prends la fuite, Ă  travers mes lignes, te dĂ©cris mes rides Me construis un mythe, oblige, j'sens qu'mon pouls ralentit Faut qu'j'laisse une trace d'un mec honnĂȘte ou d'un gros bandit Rien Ă  foutre, faut qu'j'prouve que j'ai Ă©tĂ© vivant Si tu penses que j'dois voir un psy, dis-toi qu'j'n'ai qu'le rap comme divan M'man, la marrĂ©e est haute, et j'me laisse emporter par les vagues Elles sont trop fortes, j'voudrais t'dire que j't'aime mais j'ai trop le trac Marque mon front de ton sourire S'il te plaĂźt, oublie toutes les fois oĂč j't'ai fait souffrir J'sais qu'l'effort est une force que j'maĂźtrise peu Et j'sais aussi qu'c'est le parapluie qu'il faut Quand sur tes joues il pleut Mais dans ma tĂȘte j'entends des coups de flingue incessants Un braconnier a laissĂ© des plumes de colombe, plein de sang J'voulais apprendre Ă  donner, j'ai appris Ă  tout manger Apprendre Ă  pardonner, j'ai appris Ă  me venger J'voulais apprendre Ă  aimer, j'ai appris Ă  haĂŻr J'ne voulais pas ramer, j'l'ai fait, avec un gros navire J'ai voulu Ă©viter la pluie, j'l'ai affrontĂ© en t-shirt J'la voulais pour la vie, j'ne l'ai eu que pour un flirt J'me sens, comme une bouteille Ă  la mer NoyĂ© dans les vagues de la mĂ©lancolie d'la vie Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, comme une bouteille Ă  la mer Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens Comme une bouteille Ă  la mer, j'me sens J'me sens comme une bouteille Ă  la mer, Comme une bouteille Ă  la mer Rachid Ait Baar, SaĂŻd M'Roumbaba Kobalt Music Publishing Ltd.
  1. ዬገэ глΞп фοռÎčζ
  2. Ζ ΞлօЎрեф Ö‡ĐœĐŸŃ‚ĐČωÎČаն

Jai dĂ©placĂ© des tas de montagnes. Avec la force de mes vƓux. Aujourd’hui, je connais ma diffĂ©rence. Et c'est une chance. [Refrain] Car je cours Ă  contre-courant. Vers ce qui me maintient en vie. Cette libertĂ© d’ĂȘtre qui je suis. Oui, je cours Ă  contre-courant.

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Jne l'ai eue que pour un flirt. J'me sens comme un bouteille Ă  la mer. NoyĂ© dans les vagues de la mĂ©lancolie d'la vie. Comme une bouteille Ă  la mer. J'me sens comme une bouteille Ă  la mer (x12) SOS. Comme une bouteille Ă  la mer Ă  la recherche d'un navire. Qu'on puisse me repĂȘcher et lire c'qu'il y a dans mon coeur.

Commeon laisse une derniĂšre lettre prĂšs d’une boite de Prozac vide Ça a Ă©tĂ© trĂšs difficile pour moi de venir ici D’accepter ma dĂ©pendance Ă  la mĂ©lancolie Le dĂ©clic a Ă©tĂ© de voir ma mĂšre Recracher en larme tous ce qu’elle a bu de mes bouteilles Ă  la mer Je m’en veux de la voir si triste Alors qu’elle n’a jamais Ă©tĂ© la lame de mes cicatrices Ni personne de ma famille

PrĂ©cĂ©dent25 262728 29 Suivant Danzin en Concert. Concert, Repas - DĂ©gustation CHATELUS LE MARCHEIX 23430 Le 29/08/2022 Danzin, c'est une voix habitĂ©e et mĂ©lodique, une Ă©criture poĂ©tique et ciselĂ©e (dans la lignĂ©e des Leprest, Nougaro, Ferrer), des mĂ©lodies gĂ©nĂ©reuses que l'on retient et qu'on entonne en chƓur naturellement.
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J'me Sens, Comme Une Bouteille Ă  La Mer â™Ș â™Ș NoyĂ© Dans Les Vagues De La MĂ©lancolie D'la Vie â™Ș sopranoroubaiix sopranoroubaiix _____ VlĂ Ă  Quelque Passages d'une de mes musique PrĂ©fĂ©rĂ© de S0prĂ Ă no :: Comme Une Bouteille Ă Ă  la mer _____
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paroles,clips,photo s:soprano♄ anis98-soprano6kif. Description : ↓ ↑ oĂč le groupe s'offre Ă  la fois le sample et la chanteuse du groupe espagnol Mecano, des textes plus personnels, "Comme Une Bouteille A La Mer", solo poignant de Soprano oĂč le rappeur revient sur sa relation avec sa mĂšre. Ils auront amenĂ© la rĂ©vĂ©lation de Soprano, rappeur trĂšs prolifique Jme sens comme une bouteille Ă  la mer, J'vais ou l'flot d'la vie me mĂšne loin d'tout mĂȘme de ma mĂšre, La vie m'a offert la solitude de robinson J'voudrais repeindre ma vie mais j'ne trouve pas l'bon pinceau Certain on fait l'grand saut, marier, des enfants Nous lĂąche leur discours d'rĂ©ussite leur vie est mieux qu'avant .